Évangile de l’aveugle-né, onction de David par Samuel : comment voir ? Au-delà des apparences, voir avec le coeur ? Se laisser ouvrir les yeux et voir la lumière ? Se laisser déranger dans ses propres certitudes ? Serions-nous aveugles, nous aussi ? Multitude de questions, multitude d’échanges et richesse du partage. Tous les textes de ce dimanche nous invitent à vivre dans la lumière, dans la lumière de la foi, dans la lumière du cœur habité par l’Esprit.
Entrée en prière
HONEGGER – Le roi David : introduction
Accueil
Bonjour à vous tous, amis de la communauté de Saint-Merry Hors-les-Murs, amis qui avez pris l’habitude de nous rejoindre et vous, je l’espère nombreux, qui vous connectez pour la première fois.
En ce 4e dimanche de carême, nous sommes invités à entendre une longue histoire, – celle de la guérison de l’aveugle-né – si longue que nous avons décidé de la découper en plusieurs épisodes, car c’est ainsi que nous l’avons entendue. De même que nous avons voulu partager avec vous ce matin, non pas une mais plusieurs des questions que notre discussion de lundi a fait surgir. Il y a une certaine urgence à comprendre de quoi il retourne.
Pour les disciples, les paroles du Christ restent énigmatiques.
Pour les protagonistes de la scène : les voisins qui restent incrédules ; les Pharisiens, imbus du rôle qu’ils tiennent dans la cité et prisonniers de leur certitudes ; les parents, recroquevillés sur leur peurs. Jusqu’à Paul qui exhorte les Éphésiens à vivre dans lumière.
Dans la deuxième lecture, il oppose les ténèbres et la lumière. Les activités des ténèbres se font en cachette, on a honte d’en parler, il faut les dénoncer. Cela nous rappelle honteusement le scandale qui frappe nos institutions et qui semble s’éterniser. Qui savait quoi et depuis quand ?
Alors quelle paire de lunettes chausser pour voir davantage à la manière de Dieu ?
« Dieu qui ne regarde pas comme les hommes » lit-on dans le livre de Samuel.
Puisque l’heure est venue de sortir du sommeil « Réveille toi, ô toi qui dors » écrit Paul,
puisque l’heure est venue d’affermir notre cœur, de courir vers la vie! Délaissons les
ténèbres et vivons en enfants de lumière et que vive en nous le nom du Père, du Fils et de l’Esprit.
Claire B.
♫ Chant : Vivons en enfants de lumière
CFC / J. Berthier
Vivons en enfants de lumière
Sur les chemins ou l’Esprit nous conduit
Que vive en nous le nom du Père
L’heure est venue de sortir du sommeil
Voici le temps de l’appel au désert
Allez où va le Fils de l’homme.
La joie de Dieu sur lui repose.
L’heure est venue d’affermir votre coeur
Voici le temps d’espérer le Seigneur
Il est tout près, il vous appelle.
Il vous promet la vie nouvelle.
L’heure est venue de courir vers la vie
Voici le temps de trouver Jésus Christ
Il est présent parmi les pauvres.
Il vous précède en son Royaume.
📖 Évangile de Jésus-Christ selon Jean (Jn 9, 1-41)
En ce temps-là, en sortant du Temple, Jésus vit sur son passage un homme aveugle de naissance. Ses disciples l’interrogèrent : « Rabbi, qui a péché, lui ou ses parents, pour qu’il soit né aveugle ? » Jésus répondit : « Ni lui, ni ses parents n’ont péché. Mais c’était pour que les œuvres de Dieu se manifestent en lui. Il nous faut travailler aux œuvres de Celui qui m’a envoyé, tant qu’il fait jour ; la nuit vient où personne ne pourra plus y travailler. Aussi longtemps que je suis dans le monde, je suis la lumière du monde. »
Suis-je prisonnier de mon souci des apparences ?
Cela dit, il cracha à terre et, avec la salive, il fit de la boue ; puis il appliqua la boue sur les yeux de l’aveugle, et lui dit : « Va te laver à la piscine de Siloé » – ce nom se traduit : “Envoyé”. L’aveugle y alla donc, et il se lava ; quand il revint, il voyait.
Comment m’a-t-il ouvert les yeux ?
Ses voisins, et ceux qui l’avaient observé auparavant – car il était mendiant – dirent alors : « N’est-ce pas celui qui se tenait là pour mendier ? » Les uns disaient : « C’est lui. » Les autres disaient : « Pas du tout, c’est quelqu’un qui lui ressemble. » Mais lui disait : « C’est bien moi. » Et on lui demandait : « Alors, comment tes yeux se sont-ils ouverts ? » Il répondit : « L’homme qu’on appelle Jésus a fait de la boue, il me l’a appliquée sur les yeux et il m’a dit : ‘Va à Siloé et lave-toi.’ J’y suis donc allé et je me suis lavé ; alors, j’ai vu. » Ils lui dirent : « Et lui, où est-il ? » Il répondit : « Je ne sais pas. » On l’amène aux pharisiens, lui, l’ancien aveugle. Or, c’était un jour de sabbat que Jésus avait fait de la boue et lui avait ouvert les yeux. À leur tour, les pharisiens lui demandaient comment il pouvait voir. Il leur répondit : « Il m’a mis de la boue sur les yeux, je me suis lavé, et je vois. » Parmi les pharisiens, certains disaient : « Cet homme-là n’est pas de Dieu, puisqu’il n’observe pas le repos du sabbat. » D’autres disaient : « Comment un homme pécheur peut-il accomplir des signes pareils ? » Ainsi donc ils étaient divisés. Alors, ils s’adressent de nouveau à l’aveugle : « Et toi, que dis-tu de lui, puisqu’il t’a ouvert les yeux ? » Il dit : « C’est un prophète. » Or, les Juifs ne voulaient pas croire que cet homme avait été aveugle et que maintenant il pouvait voir.
Sur quoi m’a-t-il ouvert les yeux ?
C’est pourquoi ils convoquèrent ses parents et leur demandèrent : « Cet homme est bien votre fils, et vous dites qu’il est né aveugle ? Comment se fait-il qu’à présent il voie ? » Les parents répondirent : « Nous savons bien que c’est notre fils, et qu’il est né aveugle. Mais comment peut-il voir maintenant, nous ne le savons pas ; et qui lui a ouvert les yeux, nous ne le savons pas non plus. Interrogez-le, il est assez grand pour s’expliquer. » Ses parents parlaient ainsi parce qu’ils avaient peur des Juifs. En effet, ceux-ci s’étaient déjà mis d’accord pour exclure de leurs assemblées tous ceux qui déclareraient publiquement que Jésus est le Christ. Voilà pourquoi les parents avaient dit : « Il est assez grand, interrogez-le ! »
Est-on « assez grand pour s’expliquer » ?
Pour la seconde fois, les pharisiens convoquèrent l’homme qui avait été aveugle, et ils lui dirent : « Rends gloire à Dieu ! Nous savons, nous, que cet homme est un pécheur. » Il répondit : « Est-ce un pécheur ? Je n’en sais rien. Mais il y a une chose que je sais : j’étais aveugle, et à présent je vois. » Ils lui dirent alors : « Comment a-t-il fait pour t’ouvrir les yeux ? » Il leur répondit : « Je vous l’ai déjà dit, et vous n’avez pas écouté. Pourquoi voulez-vous m’entendre encore une fois ? Serait-ce que vous voulez, vous aussi, devenir ses disciples ? » Ils se mirent à l’injurier : « C’est toi qui es son disciple ; nous, c’est de Moïse que nous sommes les disciples. Nous savons que Dieu a parlé à Moïse ; mais celui-là, nous ne savons pas d’où il est. » L’homme leur répondit : « Voilà bien ce qui est étonnant ! Vous ne savez pas d’où il est, et pourtant il m’a ouvert les yeux. Dieu, nous le savons, n’exauce pas les pécheurs, mais si quelqu’un l’honore et fait sa volonté, il l’exauce. Jamais encore on n’avait entendu dire que quelqu’un ait ouvert les yeux à un aveugle de naissance. Si lui n’était pas de Dieu, il ne pourrait rien faire. » Ils répliquèrent : « Tu es tout entier dans le péché depuis ta naissance, et tu nous fais la leçon ? » Et ils le jetèrent dehors.
Suis-je capable d’être dérangé dans mes certitudes ?
Jésus apprit qu’ils l’avaient jeté dehors. Il le retrouva et lui dit : « Crois-tu au Fils de l’homme ? » Il répondit : « Et qui est-il, Seigneur, pour que je croie en lui ? » Jésus lui dit : « Tu le vois, et c’est lui qui te parle. » Il dit : « Je crois, Seigneur ! » Et il se prosterna devant lui. Jésus dit alors : « Je suis venu en ce monde pour rendre un jugement : que ceux qui ne voient pas puissent voir, et que ceux qui voient deviennent aveugles. » Parmi les pharisiens, ceux qui étaient avec lui entendirent ces paroles et lui dirent : « Serions-nous aveugles, nous aussi ? » Jésus leur répondit : « Si vous étiez aveugles, vous n’auriez pas de péché ; mais du moment que vous dites : ‘Nous voyons !’, votre péché demeure. »
Serais-je aveugle moi aussi ?
Partage
Méditation en musique : RACHMANINOV -Prélude en do#m
> Suis-je prisonnier de mon souci des apparences ?
> Comment m’a-t-il ouvert les yeux ?
> Sur quoi m’a-t-il ouvert les yeux ?
> Est-on « assez grand pour s’expliquer » ?
> Suis-je capable d’être dérangé dans mes certitudes ?
> Serais-je aveugle moi aussi ?
Entendu lors du partage
Avalanche de questions, notions d’apparence et comment ?
Rester toujours disponible à l’échange…
Ne pas coller des étiquettes sur les événements…
Ce qui m’ouvre les yeux, c’est la compassion de Jésus…La compassion nous fait aussi ouvrir les yeux sur ceux qui dépendent de nous.
Ouvrir les yeux: ça passe toujours par autrui. Les autres m’aident à ouvrir les yeux, la communauté est importante.
La multitude des interprétations m’ouvre les yeux.
Ne pas en rester aux apparences, même si ce qu’on me dit me fait du mal.
J’ai du mal à accepter d’être dérangé dans mes certitudes parce qu’elles m’aident aussi à tenir debout.
Ce qui m’aide à ouvrir les yeux, ce peut être de la boue, une mixture infâme !
Je peux avoir le souci de ma propre apparence.
Les apparences ne sont pas toujours trompeuses : un poème, un spectacle…
Devant un tableau, j’ai souvent besoin de quelqu’un qui me fait voir le petit détail.
Besoin du regard de Dominique Hernandez pour voir le tableau présenté. On voit trop de choses.
Suis-je capable…?
Au-delà des apparences dans les échanges, comment avoir la disponibilité de cœur ?
Comment savoir si, ce qui me bouscule, vient de l’Esprit Saint ?
Jésus dit d’arrêter avec nos normes religieuses ; comment être en phase avec soi pour changer les doctrines et les normes ?
Les interlocuteurs multiples pour comprendre l’Évangile, font la richesse de la communauté.
Comment affronter la confrontation dans le respect de l’autre ? Il faut garder une stabilité et avancer quand on est perpétuellement bouleversé…
Jésus ouvre les yeux de l’aveugle avec de la boue et la boue est aux antipodes de la belle apparence.
♫ Chant : Ouvre mes yeux, Seigneur Jésus
1- Ouvre mes yeux, Seigneur Jésus, je verrai ta gloire !
Par le baptême de ta mort, tu es notre vie !
C’est Jésus, le Messie, qui met la boue sur mes yeux,
c’est lui qui m’appelle !
2- “Va te laver à Siloé, et vois la lumière !”
“Éveille-toi, ô toi qui dors, le Christ t’illumine !”
Je me lave et je vois, je crois que tu es, Seigneur,
la clarté du monde !
3- Je viens à toi, Seigneur Jésus, car je suis aveugle ;
pour ceux qui vivent dans la nuit, tu es la lumière ;
guide-moi, conduis-moi, sois ma lampe et mon soutien,
et guéris mon âme !
4- Tu viens redire au fond de nous : “Crois au Fils de l’homme !”
“Et qui est-il pour que je croie ?” “C’est lui qui te parle !”
De mes yeux je te vois, et, prosterné devant toi,
mon Dieu, je t’adore !
Prière universelle
« Dieu ne regarde pas comme les hommes : les hommes regardent l’apparence, mais le Seigneur regarde le cœur. »
Premier Livre de Samuel 16, 7
Quelles intentions de prière souhaitez-vous confier à la communauté ?
♫ Seigneur mon Dieu, dans cette nuit je crie vers Toi
Prête l’oreille à ma demande, que ma prière parvienne jusqu’à toi
Autre prière au Père
Dieu,
Toi, que nous n’avons jamais vu,
mais que Jésus nous a appris à nommer notre Père,
révèle ta présence aux pauvres et aux désespérés.
Fais de nous des témoins de ton amour sur cette terre.
Aide-nous à partager le pain que tu nous donnes,
Apprends-nous à pardonner à nos ennemis
et pardonne nos infidélités.
Rassure-nous dans les épreuves,
Délivre-nous de la peur et de la haine,
et que triomphe ton amour tout puissant
pour toujours.
Jean V.
Prière finale et bénédiction
📖 Lettre de saint Paul apôtre aux Éphésiens (Ep 5, 8-14)
Frères, autrefois, vous étiez ténèbres ; maintenant, dans le Seigneur, vous êtes lumière ; conduisez-vous comme des enfants de lumière or la lumière a pour fruit tout ce qui est bonté, justice et vérité et sachez reconnaître ce qui est capable de plaire au Seigneur.
Au-delà des apparences, gardons la disponibilité de coeur, pour être “enfants de lumière”.
Bonne semaine à chacune et chacun.
Rendez-vous lundi 20 mars à 19 h sur Zoom, pour préparer la célébration du 26 mars (lien sur l’agenda du site).
Amis lecteurs de la Parole,
L’accusation principale des pharisiens : l’homme qui a fait la boue et ouvert les yeux de l’aveugle-né “n’est pas de Dieu puisqu’il ne garde pas le shabbat” et il est “pécheur” a-t-elle fait l’objet de commentaire, de questions ? La violence de ceux qui disent “nous savons qui “jettent dehors l’aveugle de naissance guéri, qui pour eux “né tout entier dans le péché, – il le reste et en plus quel culot !- tu nous enseignes nous (“qui savons”) ?
Ce n’est pas la première fois que l’évangile de Jean comporte cette mise en question du shabbat et la violente réaction des Judéens ou des pharisiens. Voir Jn 5, 9-18 : le paralysé de Béthesda. Court récit de guérison. La parole de Jésus “Lève-toi, prends ton brancard et marche”. Et le v. 9c “C’était shabbat ce jour-là”, qui ouvre la discussion entre les Judéens et Jésus. V. 16 “Aussi les Judéens poursuivaient Jésus parce qu’il avait fait ces choses un jour de shabbat”. La profanation du shabbat ! Jésus répond : “Mon père œuvre jusqu’à maintenant et moi aussi j’œuvre.” v18. “Aussi les Judéens cherchaient d’autant plus à le tuer, non seulement il profanait le shabbat mais il disait Dieu son père se faisant égal à Dieu.”
Le shabbat et la question du septième jour ?
Le shabbat correspond au septième jour de la Genèse où “Dieu se repose de toute l’œuvre qu’il avait faite”. Gn 2, 2. Comment Jésus peut-il dire que Dieu œuvre le jour du shabbat ce qui lui donnerait à lui aussi d’œuvrer également ?
Deux traditions relevées par Jean-Marie Martin :
1. la plus courante : le 7e jour Gn 2, 2 est la fondation du jour de repos dans la semaine.
2. celle attestée dans le judaïsme alexandrin, Pour Philon d’Alexandrie : il y a deux œuvres de Dieu : les 6 premiers jours il exerce une œuvre et le 7e il cesse cette œuvre.
La symbolique la plus courante de notre Nouveau Testament est celle de la semence et du fruit (du caché au révélé).
Pendant les 6 premiers jours, Dieu dépose les semences du monde et le 7e jour commence le travail de croissance des semences. Dieu donne la semence et à la semence, il donne la croissance.
Œuvrer ce n’est pas fabriquer, c’est laisser que germe ce qui a à germer et c’est soigner, prendre soin de…
Le shabbat, médité par J-M Martin, c’est ce jour dans lequel nous sommes. C’est toute l’histoire du monde. Et c’est le dernier jour de la numération qui commence par “le jour un”.
Quand nous disons “Que ta volonté soit faite” (Notre Père), (volonté :théléma en grec équivalent de sperma : semence) nous disons “Que ta semence en moi, en nous, germe, vienne à fruit” ? Nous sommes dans le 7e jour…et nous ne savons pas ultimement ce qu’il est, sinon la résurrection, la convocation à la résurrection de toute l’Humanité…
Avec amitié sur le chemin et le cheminement dans la Parole et vers l’insu. Jacqueline Barbin