Entendre le texte des disciples d’Emmaüs de façon renouvelée, sur nos chemins peuplés de joies et de peines, de fleurs et de pierres et découvrir au long du chemin, une présence, le coeur brûlant d’une rencontre en vérité, le pain chaleureux du partage…reconnaissance du Christ ressuscité.
Entrée en prière
Haendel : Musique pour les feux d’artifice royaux
Accueil
Bonjour,
Nous sommes heureux ce matin de nous retrouver, d’accueillir ceux qui viennent pour la première fois.
Une fois encore, une nouvelle fois, une fois nouvelle, nous sommes invités à entendre le texte des disciples d’Emmaüs qui, en dix lignes extraordinaires de concision, résument tout leur vécu.
La vie du Christ à leur coté, leur déconvenue avec sa mort, leur espérance contrariée, leur stupéfaction suite au récit des femmes dont le témoignage ne peut être corroboré, car leurs compagnons l’ont dit : « lui, ils ne l’ont pas vu ».
Sur le chemin de Jérusalem à Emmaüs, c’est à leur tour de vivre la présence de leur ami auprès d’eux.
Aujourd’hui nous sommes réunis, en son nom, autour de la Parole, et nous, nous savons qu’il est au milieu de nous au nom du Père, du Fils et de l’Esprit.
Avec quoi arrivons-nous ?
La semaine a été probablement riche pour les uns, lourde pour certains, joyeuse nous l’espérons, étonnante peut-être?
De quoi discutions-nous en arrivant ?
Nous sommes invités à partager maintenant nos joies, nos peines, nos coups de gueule peut-être, et à les déposer, tels des fleurs ou des pierres sur notre chemin d’Emmaüs.
Jean-Marie R.
♫ Refrain
Écoute, écoute, surtout ne fais pas de bruit,
On marche sur la route on marche dans la nuit,
Il marche sur ta route, il marche près de toi.
Avec quoi arrivez-vous ?
… avec la grande tristesse de l’annonce du décès d’un très grand ami, prieur d’un petit prieuré près de Grenoble.
… avec tous ces témoignages faits lors des obsèques de Jacques Gaillot, comme des images d’espérance pour l’Église.
… avec cette fraternité vécue entre tous les hommes et palpable lors de cet hommage.
… avec la joie de la tenue d’une commission pour les exactions de toutes sortes commises en Colombie pendant toutes ces années, avec l’espérance que la guerre interne s’apaise.
… avec ces trois jours de fraternité vécus pendant l’assemblée générale des Petits Frères des Pauvres, et en particulier avec Barbara dans mes pensées qui anime un réseau des Petits Frères des Pauvres en Ukraine.
… avec cette fraternité vécue en Roumanie lors de la Pâque orthodoxe et avec l’accueil si fraternel de nos hôtes dans les petites pensions qui nous ont accueillis.
📖 Évangile de Jésus-Christ selon Luc (24, 13-35)
Le même jour (c’est-à-dire le premier jour de la semaine), deux disciples faisaient route vers un village appelé Emmaüs, à deux heures de marche de Jérusalem, et ils parlaient entre eux de tout ce qui s’était passé. Or, tandis qu’ils s’entretenaient et s’interrogeaient, Jésus lui-même s’approcha, et il marchait avec eux. Mais leurs yeux étaient empêchés de le reconnaître. Jésus leur dit : « De quoi discutez-vous en marchant ? » Alors, ils s’arrêtèrent, tout tristes. L’un des deux, nommé Cléophas, lui répondit : « Tu es bien le seul étranger résidant à Jérusalem qui ignore les événements de ces jours-ci. » Il leur dit : « Quels événements ? » Ils lui répondirent : « Ce qui est arrivé à Jésus de Nazareth, cet homme qui était un prophète puissant par ses actes et ses paroles devant Dieu et devant tout le peuple : comment les grands prêtres et nos chefs l’ont livré, ils l’ont fait condamner à mort et ils l’ont crucifié. Nous, nous espérions que c’était lui qui allait délivrer Israël. Mais avec tout cela, voici déjà le troisième jour qui passe depuis que c’est arrivé. À vrai dire, des femmes de notre groupe nous ont remplis de stupeur. Quand, dès l’aurore, elles sont allées au tombeau, elles n’ont pas trouvé son corps ; elles sont venues nous dire qu’elles avaient même eu une vision : des anges, qui disaient qu’il est vivant. Quelques-uns de nos compagnons sont allés au tombeau, et ils ont trouvé les choses comme les femmes l’avaient dit ; mais lui, ils ne l’ont pas vu. » Il leur dit alors : « Esprits sans intelligence ! Comme votre cœur est lent à croire tout ce que les prophètes ont dit ! Ne fallait-il pas que le Christ souffrît cela pour entrer dans sa gloire ? » Et, partant de Moïse et de tous les Prophètes, il leur interpréta, dans toute l’Écriture, ce qui le concernait. Quand ils approchèrent du village où ils se rendaient, Jésus fit semblant d’aller plus loin. Mais ils s’efforcèrent de le retenir : « Reste avec nous, car le soir approche et déjà le jour baisse. » Il entra donc pour rester avec eux. Quand il fut à table avec eux, ayant pris le pain, il prononça la bénédiction et, l’ayant rompu, il le leur donna. Alors leurs yeux s’ouvrirent, et ils le reconnurent, mais il disparut à leurs regards. Ils se dirent l’un à l’autre Notre cœur n’était-il pas brûlant en nous, tandis qu’il nous parlait sur la route et nous ouvrait les Écritures ? »À l’instant même, ils se levèrent et retournèrent à Jérusalem. Ils y trouvèrent réunis les onze Apôtres et leurs compagnons, qui leur dirent : « Le Seigneur est réellement ressuscité : il est apparu à Simon-Pierre. » À leur tour, ils racontaient ce qui s’était passé sur la route, et comment le Seigneur s’était fait reconnaître par eux à la fraction du pain.
Méditation en musique
Extrait de la musique du film ” Discovery ” – Nicholas Britell
Résonances comme sur la route d’Emmaüs
J’entends, cette fois, ce récit autrement.
Jésus a-t-il été là physiquement ?
Ne s’agit-il pas seulement du long cheminement de deux disciples qui partagent, habités par les derniers événements, et surtout, par tout leur vécu antérieur avec Jésus ? Cela les renvoie à des passages de la Bible… En parlant ensemble, ils font des liens… Peu à peu, les choses s’éclairent.
Et, au moment où ils prennent le pain, ils se revoient au cours du dernier repas de la veille du drame …
Leurs yeux s’ouvrent… Ils se sentent tout émus, tout remués, mais oui, bien sûr ! Il est vivant !
Jean-Luc L.
Comme toi, Jean-Luc, je ne suis pas très à l’aise avec une présence physique de Jésus qui reviendrait comme dans nos séries télévisées modernes.
Pour ces hommes qui viennent de perdre leur ami, l’intensité de l’absence de Jésus est vertigineuse. Ils y pensent jour et nuit. D’heure en heure, les souvenirs deviennent présence.
Leur revient ce que Jésus leur a dit si souvent, que Dieu n’est pas dans les hauteurs mais au fond d’eux.
Ils se rendent compte que ce que les paroles, ce que Jésus a fait vivre en eux, est toujours ardent.
Peut être qu’ils se sont assis pour partager le pain, pourquoi pas ? Comme il leur avait enjoint de le faire et que, oui, leur cœur est devenu brûlant.
Parce qu’ils ont ressenti que l’amour prodigué continuait de vivre en eux, ne s’éteindrait pas et qu’ils allaient vivre de sa Vie, jusqu’à leur propre mort.
Bénédicte I.-R.
Sur la route d’Emmaüs, les disciples sont tristes.
Alors, ils se souviennent de toutes les paroles de Jésus. Ils se remémorent tout son enseignement. Comme cela peut se produire quand, dans une famille ou entre amis, on évoque la mort d’un proche.
Et voilà que surgit la présence de Jésus. Il est à côté d’eux.
Mais est-ce pour cela qu’il est vivant ?
Ce n’est pas parce que l’on convoque nos souvenirs que l’on fait vivre une personne disparue. On peut partager un moment fort de cette façon, mais la mort reste la mort.
Comment est-il ressuscité ? Question sans limite !
Patricia M.
La résurrection du Christ ? Grand Mystère. Fondement de notre foi chrétienne. Joseph Pierron avait l’habitude de dire : « pas de foi sans résurrection, pas de résurrection sans foi ». Comment se représenter la résurrection ? Marie-Madeleine voit, en se retournant, le jardinier. Elle voit donc quelqu’un, puis, deuxième retournement, elle croit et elle voit le Christ. Jésus dira à Thomas : ” viens mettre ta main sur mon côté “.
Je ne peux m’imaginer la résurrection sans une présence. Sûrement différente, mais une présence quand même. Quel est cet homme qui accompagne Cléophas et son compagnon? Cet homme qui leur rappelle tout ce que les prophètes ont dit du Christ. Au partage du pain, qui d’autre que Jésus pour ce geste “immémoriel” ?
Claire B.
Oui, je marche sur la route comme les disciples qui viennent de quitter Jérusalem, désorientés et très tristes de la mort de Jésus, qui les entraînait. La rencontre avec cet inconnu les fait vider leur cœur et ils retrouvent l’élan au geste du pain partagé ; ils reprennent la route, le cœur brûlant et pleins de joie. Oui, je marche avec eux, dans la l’espérance et la conviction de la Résurrection.
Marie-Antoinette M.
Pascal disait : « je crois les témoins qui se font tuer ».
Moi aussi, pour la même raison, je crois les témoins du mystère de la résurrection.
Danielle M.
Partage
« Quand il fut à table avec eux, ayant pris le pain, il prononça la bénédiction et, l’ayant rompu, il le leur donna. Alors leurs yeux s’ouvrirent, et ils le reconnurent.
Nous qui partageons la Parole, à quoi reconnaissons-nous le Christ ?
Méditation en musique
Les voix humaines-Sainte Colombe – Concertes à 2 violes égales
Entendus lors du partage
… à la fraternité, aux petits gestes d’attention du quotidien.
… à la rencontre de l’autre en vérité.
… suite à l’annonce de ce décès, aucun signe, aveuglé par la tristesse… et maintenant, ayant partagé, je vois, en reconnaissant une présence, celle de l’ami et celle du Christ.
… quels que soient les événements et les circonstances, on en revient toujours à parler de Lui et à trouver, sans sa Parole, une source de renouveau, une source de vie.
… pas à une résurrection physique, mais au corps de lumière du Christ présent en nous ; ce qui permet d’accepter le deuil, que nos proches partent, car une autre présence émerge qui nous relie. Ce qui permet aussi d’entrer dans une dimension de joie beaucoup plus large, plus universelle.
… aux petits gestes entre frères car Jésus est toujours passé par l’humain, par des gestes, avant même la parole.
… quand je vois des choses “au-delà du possible” – comme de pardonner à ses bourreaux, ou la vague de prière de Sabeel – cela me fait vraiment penser à Jésus.
… quand on peut se mettre “à nu” sans avoir peur, en étant en paix avec soi-même et avec l’autre.
… dans le geste du service, on peut le reconnaître et c’est merveilleux.
… on a besoin de vide pour voir clair, quand c’est trop touffu, on ne voit rien.
… Il existe des moments dans ma vie de grande solitude, où il n’y a rien. Je me raccroche à cette foi que j’ai et j’ai beaucoup aimé l’image de tête avec ce Jésus qui est esquissé, présent, mais sans être là physiquement.
… quand je vois dans le film “Je verrai toujours vos visages”, je vois cette capacité du Christ à lever ces jugements, ces condamnations définitives.
♫ Chant : Emmaüs
1/ Pourquoi mes mains ne s’ouvrent plus ?
Pourquoi mon corps se traîne ?
Pourquoi mes mains ne s’ouvrent plus ?
Dis moi, dis qui tu es. (bis)
Puisqu’il se fait tard, préparons un feu
Et reste avec nous.
Parle encore un peu, raconte nous Dieu
Et reste avec nous.
2/ Pourquoi mon coeur ne comprend plus ?
Pourquoi mes yeux se ferment
Pourquoi mon coeur ne comprend plus ?
Dis moi, dis qui tu es. (bis)
3/ Pourquoi ce soir tu m’as parlé ?
Pourquoi tes mots m’apaisent ?
Pourquoi ce soir tu m’as parlé ?
Dis moi, dis qui tu es. (bis)
4/ Et puis, tu as rompu le pain
Pour le manger ensemble
Et puis, tu as rompu le pain
Oui, je sais qui tu es. (bis)
5/ Mes mains, tu les as ouvertes
Mon corps danse la fête
Et mon coeur brûle à tous tes mots
Oui, je dis qui tu es. (bis)
Prière finale
Chemin d’Emmaüs que ce moment tous ensemble pour accompagner le départ de Jacques Gaillot.
Cet homme a été lumière pour tous ces gens venus symboliquement accompagner son corps absent (parce qu’offert à la science), des hommes et des femmes fortifiés dans leur humanité et leur attention à tous ceux que l’on aurait tendance à ne pas voir ou à oublier.
Paroles sur notre route comme sur le chemin d’Emmaüs ? Écoutons son rêve.
« J’ai fait un rêve : celui de pouvoir accompagner les pauvres, les exclus, les « pas grand-chose », sans avoir à m’expliquer, me justifier auprès des riches, des nantis, des confortables. Celui de pouvoir me rendre où la détresse m’appelle sans avoir à déposer de préavis. Celui de pouvoir m’indigner contre la misère , l’injustice, la violence, le commerce des armes et les famines réglementées sans être classé en politique…
J’ai fait un rêve : celui de pouvoir vivre ma foi au sein de l’Église, mais également dans la société, dans mon temps, avec mon temps. Celui d’avoir la liberté de penser, de m’exprimer, de débattre, de critiquer sans le couperet. Celui d’être différent dans l’unité et de rester moi-même, solitaire et solidaire. Celui enfin de pouvoir annoncer un Évangile de liberté sans être marginalisé…
J’ai fait un rêve et ce rêve est devenu réalité. »
Extrait de Chers amis de Partenia lu lors de obsèques de Jacques Gaillot le 19 avril à Saint-Médard