En ce vingt-deuxième dimanche du temps ordinaire, nous sommes invités à l’humilité, à l’écoute, à la pauvreté de cœur. Et nous célébrons en unité de prière avec les détenus de Fleury-Mérogis.
Entrée en prière
♬ Méditation en musique, Bach, variation Goldberg n° 9
Accueil
Bonjour et bienvenue à vous toutes et tous en ce dernier jour d’août, certains déjà rentrés, d’autres encore en villégiatures ; certains habitués à cette célébration dominicale en visio, d’autres plus récents ou tout nouveaux. Les textes proposés ce dimanche sont un appel à l’humilité. Ce peut être celle des humbles, quelquefois proche de l’humiliation – « les petits, les sans-grades… » -, et nous portons aujourd’hui particulièrement dans nos pensées les détenus du bâtiment D2 de Fleury-Mérogis qui célèbrent ce matin en compagnie de nos amies Éliane et Hélène, du groupe chant de Saint-Merry Hors-les-Murs, qui ont préparé cette rencontre autour de la Parole avec nous.
Il y a aussi le chemin d’humilité proposé à chacun de nous, l’humilité de l’écoute, ou celle qui ne se hausse pas du col (ni dans le voir, ni dans l’agir), et ne revendique pas la première place comme invitée dans les festins. Invités, nous le sommes tous, et nous avons répondu ce matin à cette invitation au partage de la Parole, dans lequel je vous invite donc à entrer, au nom du Père, du Fils et de l’Esprit.
Blandine A.
📖 Livre de Ben Sira le Sage (Si 3, 17-18.20.28-29)
Mon fils, accomplis toute chose dans l’humilité, et tu seras aimé plus qu’un bienfaiteur. Plus tu es grand, plus il faut t’abaisser : tu trouveras grâce devant le Seigneur. Grande est la puissance du Seigneur, et les humbles lui rendent gloire. La condition de l’orgueilleux est sans remède, car la racine du mal est en lui. Qui est sensé médite les maximes de la sagesse ; l’idéal du sage, c’est une oreille qui écoute.
Résonance
Nous étions une dizaine lundi dernier, réunis derrière nos écrans pour préparer la célébration de ce dimanche . Il y avait Danièle et Bernard, Blandine, Claire, Colette, Éliane, Marie-José et Jean-Luc, Jean, Patricia… On allait lire à haute voix les textes du jour, partager ce qu’ils éveillent en nous, choisir la phrase du lutrin virtuel et la question du partage, les chants, etc. J’avais lu à l’avance l’évangile et j’avais commencé à méditer sur l’idée du « don » car le mot revient plusieurs fois avec le mot « inviter, invitation ». Et qu’est-ce qu’un don, un vrai don qui n’attend rien en retour ? Mais j’ai parlé trop tôt, j’ai pris la première place dans la conversation, d’autres « résonances », comme on dit, sont venues prendre la place de ma méditation sur le don, et petit à petit ma proposition a été recouverte par de nouvelles propositions et je ne pouvais plus couper le fil de la conversation sans revenir en arrière.
Alors je me suis tu et j’ai écouté. Et c’est à ce moment que Claire raconté une histoire de sac de riz répandu sur la chaussée par une pauvre femme. Claire a vu la scène parce qu’elle se déplace en fauteuil roulant et son regard est à la hauteur de ce qui se passe sur la chaussée. Je ne sais plus bien comment son histoire s’accrochait au fil de notre échange, mais ce que je sais c’est qu’une véritable parabole a poussé devant nous, comme le grain de moutarde de l’évangile, la parabole d’un grain de riz qui a conduit à une bouleversante rencontre. Vous allez l’entendre tout à l’heure, après la lecture de l’évangile.
Dans les partages, partages de la parole comme partages des repas, mieux vaut ne pas prendre la première place mais tendre avec humilité une oreille qui écoute.
Jean V.

♫ Chant : Écoute la voix du Seigneur
Écoute la voix du Seigneur
Prête l’oreille de ton cœur
Qui que tu sois ton Dieu t’appelle
Qui que tu sois il est ton Père
Refrain
Toi qui aimes la vie, ô toi qui veux le bonheur
Réponds en fidèle ouvrier de sa très douce volonté
Réponds en fidèle ouvrier de l’Évangile et de sa paix
Écoute la voix du Seigneur
Prête l’oreille de ton cœur
Tu entendras que Dieu fait grâce
Tu entendras l’Esprit d’audace
Écoute la voix du Seigneur
Prête l’oreille de ton cœur
Tu entendras grandir l’Église
Tu entendras sa paix promise
📖 Évangile de Jésus Christ selon Luc (Lc 14, 1.7-14)
Un jour de sabbat, Jésus était entré dans la maison d’un chef des pharisiens pour y prendre son repas, et ces derniers l’observaient. Jésus dit une parabole aux invités lorsqu’il remarqua comment ils choisissaient les premières places, et il leur dit : « Quand quelqu’un t’invite à des noces, ne va pas t’installer à la première place, de peur qu’il ait invité un autre plus considéré que toi. Alors, celui qui vous a invités, toi et lui, viendra te dire : ‘Cède-lui ta place’ ; et, à ce moment, tu iras, plein de honte, prendre la dernière place. Au contraire, quand tu es invité, va te mettre à la dernière place. Alors, quand viendra celui qui t’a invité, il te dira : ‘Mon ami, avance plus haut’, et ce sera pour toi un honneur aux yeux de tous ceux qui seront à la table avec toi. En effet, quiconque s’élève sera abaissé ; qui s’abaisse sera élevé. »
Jésus disait aussi à celui qui l’avait invité : « Quand tu donnes un déjeuner ou un dîner, n’invite pas tes amis, ni tes frères, ni tes parents, ni de riches voisins ; sinon, eux aussi te rendraient l’invitation et ce serait pour toi un don en retour. Au contraire, quand tu donnes une réception, invite des pauvres, des estropiés, des boiteux, des aveugles ; heureux seras-tu, parce qu’ils n’ont rien à te donner en retour : cela te sera rendu à la résurrection des justes. »
♬ Méditation en musique : Telemann, musique pour table

Résonance
Je vais essayer de vous rapporter l’histoire qui m’est arrivée, il y a quelques années maintenant. Je l’ai déjà racontée, mais à la préparation de cette célébration, les personnes qui étaient là ont demandé à la réentendre.
Je revenais d’un déjeuner assez joyeux avec ma sœur et mon neveu. Je descends du bus, fais une cinquantaine de mètres, et m’arrête interloquée par une image que j’ai cru apercevoir. Je fais demi-tour et effectivement, entre deux voitures, je vois une femme accroupie ramassant du riz et le mettant dans sa poche. Je m’approche d’elle et lui demande si c’est pour manger qu’elle ramasse ce riz. Dans un premier temps elle me dit non, puis elle se ravise et me dit oui, en ajoutant : « J’ai honte, mais j’ai honte. » Je lui rétorque que ce n’est pas elle d’avoir honte, mais que c’est nous qui devrions avoir honte de la laisser ramasser du riz par terre pour se nourrir.
Je lui demande de se redresser et je mets mon bras autour de sa taille ; elle prend mes épaules. Je lui propose de rentrer au supermarché qui est à côté et de faire les courses pour elle. Elle refuse : « Ça fait tellement longtemps que je ne suis pas rentrée dans un magasin comme ça ». Je propose alors d’aller jusqu’à la boulangerie et de lui acheter quelque chose à manger, elle refuse. Nous restons serrées l’une contre l’autre une vingtaine de minutes environ. Je ne lui demande rien. Elle me dit que plus personne ne la regarde, ne fait attention à elle. Je lui demande si je peux l’embrasser.
Je vois une de ces images qu’on a dans nos missels, un Christ, vêtu de bleu et blanc, et qui me dit : « Ce que tu fais au plus petit d’entre eux, tu me le fais à moi. » J’ai l’impression d’être au milieu d’une parabole. Après un certain temps, je réussis à lui donner 20 euros. Je lui demande son numéro de portable, elle n’en a même pas ; je lui indique mon adresse et puis on se sépare, elle s’appelle Sylvie, c’est tout ce que j’obtiendrai d’elle. Je suis revenue plusieurs fois sur cette même place, mais je n’ai jamais revue. J’espère lui avoir apporté un peu de réconfort ; elle, je ne la remercierai jamais assez de m’avoir fait vivre un instant pareil.
Claire B.

♫ Chant : Bienheureux le pauvre
Bienheureux le pauvre au seuil des festins
Les palais de Dieu lui sont fraternels
Bienheureux le monde où l’argent n’est rien
Les trésors de Dieu seront éternels
Résonance
Je suis frappé par la fin de l’Évangile : « Quand tu donnes une réception, invite des pauvres, des estropiés, des boiteux, des aveugles … ». Cela ne nous renvoie-t-il pas à nous même ? Je me retrouve assez bien dans cette description d’hommes et de femmes d’aujourd’hui : ces précaires à la recherche d’une vie décente, ces personnes en marche à la recherche d’une route pleine d’embuches, ces mal-voyants qui ne perçoivent pas la détresse autour d’eux.
Bienheureux sommes-nous, car nous aussi nous sommes invités au repas de noces. Mais qu’est-ce que cela veut dire ? À quoi donc sommes-nous invités ?
Bernard R.
♫ Méditation en musique : La harpe de David-Josué Grace

Partage
À quoi sommes-nous invités ?
Quelques échos du partage :
- Invités à inventer nos vies au jour le jour sans recettes toutes faites, à écouter, à réagir.
- Je ne sais à quoi je suis invité, mais je m’efforce de rester disponible à l’inattendu, quoi qu’il arrive.
- Invités à rester heureux avec les autres, comme dans les accueils de jour du Secours Catholique ; à s’apprivoiser comme dans le Petit Prince, à échanger et créer de la fraternité.
- Invités à nous réconcilier, à ouvrir nos cœurs.
- Invités au partage autour d’un bon repas, en famille notamment : moment évangélique où on apprend à se connaitre, à s’aimer.
- L’important est d’être invité, pas de savoir à quoi ; de se savoir attendu.
- Invités à regarder dans une autre direction, comme Claire, comme la religieuse qui, au vu de la comptabilité de sa communauté, à créé une filière de finance responsable.
- Invités à danser avec tous, avec ce monde.
- Invités à prier en silence, quand on n’arrive pas à parler pour répondre aux agressions verbales contre d’autres hommes et femmes.
- Invités à vivre, l’aventure est au coin de la rue…
- Invités à rester à sa juste place.
- Je suis invitée à donner mon sourire et mon merci à ceux qui s’occupent de moi.
- Invités à s’abaisser, à être plus humble, pour que l’autre soit élevé, ou à ne pas être un obstacle à ce qu’il puisse prendre sa propre place.
- Invités à rester disponibles à la rencontre, au temps pour et avec les autres.
- Invités à rien, à ce qui peut arriver ou pas.
- Invités à croire en la relation.
♫ Méditation musicale : Vivaldi , Les quatre saisons, L’automne
Prière universelle
Refrain
Entends nos prières, entends nos voix
Entends nos prières monter vers toi
Quelques-unes des intentions partagées :
- Pour les Palestiniens, pour que Ziad puisse venir en France.
- Pour les habitants de Fleury-Mérogis, en particulier ceux du bâtiment D2 avec qui nous sommes en union de prière ce matin.
- Pour tous les écoliers et leurs professeurs ; comme disait Joseph Pierron : qu’ils laissent advenir ce qui est semé au plus profond d’eux-mêmes.
- Pour ceux qui ne sont jamais invités.
- Pour que nous sachions être attentifs aux signes de détresse des enfants en souffrance, maltraités, abusés ; que nous sachions quoi faire et comment faire.
Et pour toutes les autres intentions, y compris non exprimées, que nous avons portées en nos cœurs ce matin.
Notre Père

Psaume et bénédiction
Nous venons de partager en évoquant l’invention, l’inattendu, la fraternité, l’humilité, la relation, la disponibilité, la réconciliation, le regard, l’échange, le partage, l’écoute, le sourire, la danse, la vie.
À l’issue de cette célébration, nous pouvons conclure notre prière par l’écoute du psaume.
📖 Psaume 67 (68), 4-5ac, 6-7ab, 10-11)
R/ Béni soit le Seigneur : il élève les humbles. (cf. Lc 1, 52)
Les justes sont en fête, ils exultent ;
devant la face de Dieu ils dansent de joie.
Chantez pour Dieu, jouez pour son nom.
Son nom est Le Seigneur ; dansez devant sa face.
Père des orphelins, défenseur des veuves,
tel est Dieu dans sa sainte demeure.
À l’isolé, Dieu accorde une maison ;
aux captifs, il rend la liberté.
Tu répandais sur ton héritage une pluie généreuse,
et quand il défaillait, toi, tu le soutenais.
Sur les lieux où campait ton troupeau,
tu le soutenais, Dieu qui es bon pour le pauvre.
Et que la bénédiction du Seigneur soit sur nous, lui qui est Père, Fils et Esprit.




