Une culture commune à réinventer
Notre groupe « Écoute et dialogue » s’est réuni quatre fois depuis la fin avril, sous l’impulsion de Marguerite Rousselot et avec Nicolas Maurin comme animateur. Nous avons fait connaissance en échangeant sur nos expériences personnelles, heureuses ou malheureuses, et en partageant sur nos constats, nos envies/besoins pour nous-mêmes comme membres de la communauté, et sur nos souhaits et désirs pour la communauté.
Nous sommes une douzaine de participants actifs : un mélange de professionnels concernés par ce domaine, des personnes compétentes de par leur expérience et leur charisme, et de personnes simplement motivées. Nous avons déjà également contacté des personnes extérieures à Saint-Merry. Notre groupe se reliera aux autres et espère exister pour le bien de la communauté.
Nous estimons que nous serions chacun personnellement plus heureux et que notre communauté gagnerait à mieux écouter et dialoguer. Quand on y réfléchit, l’écoute de l’autre et le dialogue avec des « différents » sont mis en œuvre concrètement depuis sa fondation, le CPHB se voulant caisse de résonance : solidarités, diversité humaine impliquant une pastorale d’accueil, voies d’un véritable dialogue, droits de l’homme, valeurs républicaines, liturgie, accueil inconditionnel, inclusion, œcuménisme, etc. Dès sa fondation, cette assemblée ouverte sur le monde dans son ADN, est diverse et ne veut pas être celle d’une seule ou de quelques leaders : coresponsabilité préfigurant la synodalité, collégialité, subsidiarité, fraternité, etc.
Cette capacité d’écoute et de dialogue avec l’extérieur est encore plus nécessaire pour sortir de la crise ouverte que nous traversons : dans nos manières de protester, dans nos demandes à être entendus, mais, même si seul le silence nous répond, nous pouvons tirer un bénéfice personnel de cette crise en nous demandant pourquoi, d’une certaine façon, notre mission nous a été retirée et si ce n’est pas aussi à cause d’un certain déficit d’écoute et de dialogue (en notre sein ? avec l’Église ? avec l’extérieur ? ).
Par ailleurs, nous avons à contribuer chacun en interne à bâtir « notre » projet en discutant tous ensemble, et personne ne doit être exclu de ce discernement collectif menant à une coresponsabilité de gouvernance. L’écoute et le dialogue seront mis à rude épreuve car le projet commun sera forcément distinct de l’ancien, répondra à des besoins parfois nouveaux, intégrera les souhaits de nouveaux membres et de jeunes membres, établira de nouvelles relations avec des interlocuteurs comme le diocèse ou des groupes variés, catholiques, chrétiens, en recherche, indifférents… Les tensions sont chronophages et notre non-écoute et le silence de l’autre nous priveraient des ressources de l’autre…
Or deux grands courants amènent au CPHB : d’une part la liberté de pensée et d’agir de personnalités affirmées ayant de fortes convictions et très actives, et d’autre part l’inquiétude douloureuse de personnalités qui souffrent (personnellement ou non) des fragilités, des différences, des blessures, des exclusions, et qui espèrent trouver là un lieu fraternel et accueillant, un atout dynamique au sein de l’Église. Ces choix par élection sont une richesse, mais cela nous impose une attention intense et sensible dans notre manière de communiquer, aussi bien nouveaux arrivants qu’« anciens » et habitués.
Il y a bien sûr les difficultés habituelles (les préjugés, la difficulté à faire place au(x) nouveau(x) : « il faut du courage pour intervenir », « et encore plus pour contredire ! »), mais nous souhaitons que la qualité de l’écoute, le partage et l’accueil, si fondamentaux et mis en œuvre dans nos « axes » soient et restent un des marqueurs existentiels de notre communauté et permettre à chacun d’y être heureux. Qu’ils soient une culture commune même en interne, même invisiblement, même préventivement.
Des échanges respectueux et une communication “non-violente”, bienveillante et calme, permettront la construction collective d’un projet et de sa réalisation : ouverture de la parole, interaction des personnes, partage consensuel des opinions, des décisions, des choix.
Par ailleurs notre communauté a été blessée et nous avons peut-être blessé, même involontairement, et parfois cela s’est passé entre membres ou entre groupes : il nous faut, sur les attitudes reprochées et les dysfonctionnements qui ont pu se produire, entreprendre un travail de façon constructive et fraternelle, pour pouvoir faire justice et pardonner. Cette question délicate relève de l’écoute et du dialogue également.
Nous avons besoin d’outils pour régler nos conflits ou les anticiper par la communication non violente (conseils de Benoist de Sinety en mai 2019, vote de l’AG de 2019). Ceux qui disent ne pas avoir besoin d’améliorer leur écoute ou repoussent cela comme inutile se demandent-ils pourquoi ?
Un échantillon de rappels qui pourraient être utiles
- Avant même de commencer à dialoguer, une posture d’acceptation profonde de l’ « autre », du « nouveau », sans préjugé, jusqu’à ses silences et à l’implicite, etc. Les valeurs qui sont à l’œuvre dans notre jugement sont-elles évangéliques ? Sont-elles celles de la communauté ?
- Lors des discussions visant à prendre en commun des décisions : solliciter celui qui peine à s’exprimer ; éviter l’esprit partisan ou de « chapelle » ; passer du ressenti au factuel ; prendre le temps d’aboutir à un consensus, pour que chacun soit satisfait.
- Dans l’action : confier des missions indépendamment du statut des personnes ; sortir du hiérarchique. Ne pas repousser le traitement d’une crise. Proposer le pardon.
Puisque nous sommes (dans) une communauté chrétienne, nous allons travailler à partir de ce que les évangélistes ont voulu nous transmettre de la manière dont Jésus a écouté et dialogué : nous commencerons par nous en imprégner pour en voir et en sentir les fruits, afin de pallier au côté parfois artificiel des techniques de communication.
Comment s’équiper et équiper la communauté ?
Par des actions et initiatives concrètes à proposer ou/et à organiser avec ou pour elle (méthodologie du travail en groupe et aide à l’organisation style Charles Rodjman, Françoise Keller ; non-violence, Carl Rogers).
- composer nous-mêmes ou mettre à disposition une boîte à outils comprenant des moyens de se former ; des fiches techniques, des textes et des références, et une charte…..
- mettre en place des médiateurs internes, des facilitateurs, des ressources externes….
- proposer des moyens disponibles à la demande, au cas par cas : rencontre individuelle, en petit groupe, en grand groupe, pour l’assemblée entière ; stages ou Zooms, écrit, oral ou autre.
- voir si les gens blessés peuvent écrire à notre groupe qui les écoutera et leur proposera de prier pour eux.
groupe-ecoute-dialogue@saintmerry-hors-les-murs.com
Marguerite et Nicolas