7 000 parisiens ont contribué à la préparation du Synode. Un chiffre incroyable pour André Letowski qui s’est penché sur les contributions publiées sur le site du diocèse et nous donne un aperçu de ce travail très riche, responsable, sans « langue de buis ».
Au-delà du nombre, que l’on peut estimer insuffisant ou au contraire porteur d’espoir, ce que j’ai le plus apprécié pour Paris, c’est le fait que les constats « dérangeants » n’ont pas été « mis sous le tapis ». Plus incisif, l’article du Monde du 17 juin titrait « fonctionnement de l’Église : les catholiques bousculent leur clergé », alors que le document de synthèse produit par la Conférence Épiscopale intitulé « Collecte des synthèses synodales » adoptait un ton plus « catho bon teint ».
Mais je reviens au texte de synthèse produit par l’équipe en charge de la synodalité à Paris, un remarquable travail qui se décline en un livret synthèse de 56 pages (avec de nombreuses propositions pour aller de l’avant), un rapport plus complet de plus de 200 pages et le texte envoyé à la Conférence Épiscopale, dont il a été rendu compte à Saint-Sulpice le dimanche 22 mai où nous étions une quinzaine de notre communauté. Beaucoup de propositions ont été formulées (pour Paris, 70 à 90 % des contributions ont formulé des propositions).
Vous trouverez ICI le lien vers les trois versions.
Soucieux, en ce temps de nomadisme, de rejoindre les contributeurs Parisiens, mon propos s’appuiera sur ce que les 6 480 participants (694 contributions collectives envoyées), dont plus de 150 pour notre communauté (15 contributions envoyées), ont mis en avant. Les synthèses produites l’ont toujours été en équipe.
Une brève information tout d’abord sur qui sont ces contributeurs : 61 % sont des femmes, 10 % des religieux ; 58 % des plus de 55 ans, 24 % des 36-55 ans et 18 % des moins de 36 ans. 69 % viennent de paroisses, 23 % de groupes localisés au domicile d’un participant ou d’un autre lieu comme la maison Ozanam ou une école, 5 % de communautés religieuses.
Neuf thèmes principaux ont été abordés : l’accueil/écoute par 92 % des contributions, les célébrations/la liturgie par 76 %, la gouvernance par 74 %, la communication (le discours peu audible de l’Église) par 60 %, les engagements dans la société par 57 %, la formation par 54 %, le dialogue dans l’Église par 49 %, la place des femmes par 43 %, l’œcuménisme par 39 %.
Des désaccords, minoritaires en nombre, sont apparus notamment sur les thèmes célébrations/liturgie (10 %), sur celui de la gouvernance (7 %), sur celui de la place des femmes (5 %) et sur celui de l’écoute (5 %) contre 1 à 4 % pour les autres thèmes.
Ce que j’ai repéré comme étant stimulant :
À propos de l’écoute, il est regretté un manque général d’écoute et d’écoutants (« nous ne consolons pas assez la misère du monde »), le risque de l’entre-soi et le sentiment d’exclusion ressenti par certains contributeurs, alors que l’accueil inconditionnel est sollicité comme exigence des évangiles.
Ce manque est complété par une parole trop calée sur des interdits, qui excluent. Plusieurs groupes parlent par ailleurs « d’une Église cléricale en surplomb, gardant le monopole de la Parole ». En réponse, Il est proposé des groupes de partage de la Parole. Je note aussi que des contributeurs déplorent « l’écoute trop passive » de nombre de paroissiens.
Alors qu’en est-il de la visibilité du message des évangiles en direction de nos contemporains ? Si la cohérence entre la foi et l’engagement au sein de la société se conjugue dans le sentiment d’être appelé, les contributeurs constatent un écart de plus en plus flagrant entre les enseignements de l’Église et le vécu des fidèles et celui de nos contemporains ; « l’annonce de l’Évangile ne serait adaptée ni à la vraie vie, ni aux questions morales, civiques, ni aux débats scientifiques et techniques ». Proposition est faite de petites communautés vivantes qui se nourrissent de la Parole et témoignent par leur action. Il s’agit aussi d’explorer les possibilités d’interaction entre le monde de la culture et de l’art.
Et puis « il faut replacer le peuple de Dieu avant la hiérarchie », pour mettre en œuvre « le sacerdoce commun », et « faire confiance à l’intelligence collective comme clé pour construire l’Église de demain ». La nécessité de « mieux associer les laïcs à la gouvernance de l’Église, à tous les niveaux, revient dans un grand nombre de contributions ».
L’idée de contre-pouvoir se fait jour. C’est aussi « le désir d’un nouveau rapport avec les prêtres, un retour aux sources du temps des premiers chrétiens, où les pasteurs accompagnaient » ; « dans une Église plus fraternelle, les prêtres deviendraient davantage les garants de la fraternité », privilégiant une culture du dialogue, qui se traduit par la consultation, la délégation, la transparence, voire la coresponsabilité.
Et puis, il y a la place des femmes, « totalement invisibles dans le fonctionnement et la gouvernance de l’Église, alors qu’elles assument une grande partie des tâches ordinaires ». « Le discours genré est de moins en moins entendable ». « Plus largement, c’est une juste place des femmes » qui est souhaitée.
Le thème célébration/liturgie est apparu comme le sujet le plus sensible et pour lequel les positions sont plus souvent tranchées (demande de formalisme pour faire unité). Les problèmes évoqués sont le manque de convivialité, au sens où la célébration ne permet pas de faire communauté (alors est proposé de soigner les repas de l’après-messe), où l’on s’ennuie, où le langage liturgique est trop complexe, où plus grave, on ne trouve pas de sens (notamment pour les jeunes, mais pas seulement), alors que le souci d’implication est fort (s’emparer des lectures, des chants, des « homélies » …).
Que faire de tout cela ?
Les avis et propositions exprimés rejoignent largement les fondamentaux de notre communauté hors les murs. Il est toutefois bon de relire tranquillement ces textes pour ajouter des points que j’ai traités trop brièvement.
Une chance ne nous est-elle pas offerte de contacter ces groupes répondants, pour que dans notre démarche de nomade, nous les rejoignons pour dialoguer, voire construire des partenariats ?
André Letowski