Ziad Medoukh est vivant, physiquement et mentalement. Il nous envoie, chaque fois qu’il le peut, des messages où le réalisme le plus cru le dispute à l’espoir, convaincu que l’enfer qu’il subit avec son peuple finira bientôt par la victoire sur le mal, le retour de la lumière et l’avènement de la justice.
« La vie n’est pas seulement nourriture, emploi, santé, famille, argent, voyages et confort mais aussi âme noble, grandeur d’esprit, sentiments sincères, quiétude, grand cœur, bonheur, principes, convictions, mœurs, rêves, amour, bonté, sagesse, espérance et dignité. Même si à Gaza actuellement, il n’y a rien, ni nourriture ni eau ni médicaments, ni horizons ni perspectives, les cœurs sont brisés et saignent au quotidien à la suite de cette agression horrible contre une population civile abandonnée.
La ville n’est pas uniquement quartier, maison et toit, mais encore souvenir, appartenance, attachement et fierté. À Gaza, les maisons sont détruites et les quartiers sont dévastés. Les souvenirs sont partis sous le feu et les décombres.
La patrie n’est pas nécessairement terre, carte d’identité, citoyenneté et droits, mais surtout devoir, protection, engagement, solidarité, résilience, résistance et sacrifice.
Et moi, ma patrie c’est la Palestine, et ma ville c’est GAZA, GAZA et GAZA.
Et j’en suis fier.
C’est très difficile pour moi de m’éloigner de ma ville et de me séparer de ma belle Palestine, malgré l’horreur absolue, les atrocités subies et cette situation effroyable.
Même si l’Humanité est plus grande qu’un pays et qu’une nation.
L’Humanité c’est vous, les solidaires de bonne volonté partout dans le monde.
Vous, la victoire de la lumière et de la justice.
Vous les humanistes pour la paix. »
Ziad Medoukh, Gaza, 24 mai 2024
Quelques commentaires relevés sur WhatsApp
« Merci pour ton texte, il nous fait du bien devant notre incapacité à pouvoir peser.
Vous êtes un peuple digne. »
« Ziad, tu es une lumière pour le monde, qui tôt ou tard se rendra compte
de ce qu’il doit aux Palestiniens et aux Gazaouis en particulier.
Courage ami, l’humanité sensible et pensante est avec toi et tes compatriotes. »
« Notre cœur saigne avec toi et vous tous.
Courage, tiens bon, tenez bon, votre attachement à votre terre est une fierté aussi pour nous.
Nous ne vous lâchons pas, nous ne lâchons rien. »
« Quelle leçon d’humanité ! Elle donne raison à Victor Hugo qui souhaitait
“avoir pour patrie le monde et pour nation l’humanité” (Les Burgraves, 1843). »
La ressource du droit international
La situation de Ziad et de ses compatriotes serait moins désespérée si le gouvernement israélien respectait le droit international. Rappelons que le 26 janvier dernier, la Cour internationale de justice (CIJ), saisie par l’Afrique du Sud, ordonnait à Israël de prévenir tout acte de génocide et de permettre l’entrée de l’aide humanitaire dans la bande de Gaza.
Or non seulement le gouvernement israélien n’a pas obtempéré, mais il a aggravé la situation en intensifiant ses bombardements sur toute l’enclave et en étendant son offensive au sud, en fermant les accès terrestres, en laissant son armée et les colons attaquer les camions humanitaires et détruire leurs contenus.
L’Afrique du Sud ayant déclaré devant la CIJ que la situation avait atteint un « niveau horrible » – évoquant notamment, en plus du blocage de l’aide humanitaire, l’existence de fosses communes et d’actes de torture -, la Cour a pris une nouvelle ordonnance le 24 mai dernier, exigeant qu’Israël arrête « immédiatement » son offensive militaire à Rafah. Sans résultat pour l’instant.
Parallèlement, le 20 mai, le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), Karim Khan, a requis des mandats d’arrêt internationaux pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité à l’encontre du premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou et de son ministre de la Défense Yoav Gallant, accusés d’avoir délibérément affamé et attaqué des civils et commis des crimes de persécution et d’extermination contre la population de Gaza. Sont également visés trois dirigeants du Hamas : le chef du bureau politique Ismaïl Haniyeh, le commandant des brigades Al-Qassam Mohammed Deïf et le chef du Hamas à Gaza Yahya Sinwar, poursuivis pour extermination, meurtre, prise d’otages, viol, torture et actes inhumains.
Si les juges de la CPI sont convaincus qu’il existe des motifs raisonnables de croire que ces crimes ont été commis, les mandats d’arrêt seront confirmés. Les 124 États membres de la CPI, y compris les nombreux États européens soutenant Israël, auront alors l’obligation d’arrêter les personnes visées par ces mandats si elles se rendent sur leur territoire.
Il faut se féliciter que la CPI statue sur les crimes commis le 7 octobre et bien évidemment aussi sur ceux commis depuis dans la bande de Gaza. Mais il faudra aussi poursuivre les crimes commis dans le reste de la Palestine occupée (Cisjordanie, Jérusalem-Est), où sévit un sanglant et illégal nettoyage ethnique. Autre point positif : la multiplication du nombre de pays qui reconnaissent l’État de Palestine. Récemment l’Espagne, l’Irlande et la Norvège ; bientôt probablement la Slovénie et Malte.
Cette implication du droit international dans une région où il fait cruellement défaut est cependant bien fragile, en raison notamment de l’attitude des grandes puissances : hostilité pour certaines (États-Unis, Canada, Grande-Bretagne), frilosité pour d’autres (dont la France).
Laurent B.
Ziad, un exemple… Merci.