Plusieurs fois depuis la rentrée, James, notre prêtre accompagnateur a fait allusion au festival des poussières qui s’est déroulé sur quatre jours, fin août en Côte d’Or. Pour en savoir plus et sur son conseil, nous avons rencontré Laleh Joncheray, l’une des participantes.
Les poussières sont ce qui reste quand les temps sont consommés. Elles sont donc ce qui résiste. Elles sont partout mais incontrôlables. Elles sont partout, ne sont donc d’aucun lieu. Elles logent dans les interstices. Elles sont obscures mais scintillent quand surgit un rayon de soleil. Certaines sont dans des châteaux, d’autres dans des tas de boue mais aucune ne peut dire qu’elle n’est pas égale aux autres. Nous sommes les poussières qui prennent leur envol.
Voilà quelques extraits de ce qu’on peut lire sur le site d’Anastasis autrement dit “résurrection“, le collectif organisateur du festival. Anastasis qui se décrit ainsi :
« La grande majorité d’entre nous est catholique,
certains appartiennent aux traditions protestantes ou orthodoxes.
Notre désir profond est de faire vivre dans notre pays
un christianisme prenant au sérieux la radicalité de l’Évangile. »
À qui s’adresse ce festival, Laleh ?
Plutôt à des jeunes, ne serait-ce que parce qu’il nécessite de camper sous tente. La moyenne d’âge est autour de 35 ans. Mais James, comme mon conjoint et moi, sommes bien au-delà ! Il accueille surtout des gens, urbains, agriculteurs, sans préjugés, sans opinion préconçue sur l’âge, le genre, les origines, la politique, la foi. La plupart, issus de la bourgeoisie, ont mené des études supérieures mais ont pris leur distance avec leur éducation. « J’aurais aimé que mes parents viennent ici, comme vous. » m’a confié une jeune fille, pendant un temps de relecture journalière. Distance aussi avec les Églises, en particulier l’Église catholique romaine. Ils ne cherchent pas à la transformer ou à la provoquer. Ils veulent améliorer la société dans son ensemble, poussés par leur foi, attachés au concret, plus qu’aux grandes idées. Ils avancent, espérant « faire avancer le Royaume » en tâchant d’injecter davantage de justice, de liberté et d’amour, là où ils sont, au jour le jour. Nous étions 550 participants.
Que s’y passe-t-il ?
Une série de conférences, quelques tables-rondes, divers ateliers, des forums, des temps de méditation, de prière, de célébrations créatives (œcuméniques, interreligieuses, donnant une place à des personnes LGBTQIA+…).
Le programme a commencé par un grand jeu qui obligeait à se rencontrer. Il fallait trouver des gens qui partageaient des traits communs. Moi, Laleh, je suis d’origine iranienne et je vis à Antibes. J’ai dû parler avec beaucoup de personnes avant d’en rencontrer deux venues des Alpes-Maritimes !
Parmi les conférences : Décoloniser le christianisme avec Léonard Katchekpele, prêtre et théologien congolais ; Le capitalisme est-il compatible avec le christianisme ? par Pierre-Louis Choquet, chercheur en sociologie ; Féminisme en Église, une impossible révolution ? avec Lucy Sharkey, membre de Oh my Godess ou encore L’idolâtrie : tentation spirituelle et politique par Marion Muller-Colard, théologienne.
Les ateliers étaient très éclectiques :
– Délivrez nous de l’automobile ; yoga ; danse ;
– Ruralités : rester, partir, revenir ;
– Gestion des conflits ; poterie ; cirque ;
– Ouvrir et tenir un tiers-lieu chrétien, avec les membres du Dorothy.
Les discussions étaient animées autour de thèmes parfois inattendus :
– Pour une théologie critique de la police
– Peut-on communier avec des hosties génétiquement modifiées ?
On ne pouvait, évidemment, participer à tout mais tout était remarquablement organisé et mené par des spécialistes. Je dirais que c’est un festival très rassembleur.
Vous, personnellement, qu’en avez-vous retenu ?
Les intervenants étaient très accessibles et pédagogues. Leur foi, les croyances de ces intervenants comme des participants (catholiques, protestants, orthodoxes, musulmans, juifs) les incitent à vouloir changer le quotidien. Ils se bougent, ils agissent concrètement et ce n’est pas toujours facile. Il y a là, par exemple, des cadres de grandes entreprises qui, elles, n’agissent pas de façon très éthique. Et toutes sortes de positions compliquées à tenir.
Ces gens ne cherchent pas à donner des leçons. IIs cherchent ensemble, en se rencontrant, des solutions pour construire une humanité juste et conviviale, où chacun, quel qu’il soit, quelle que soit sa culture, son histoire, se sente acteur.
J’ai trouvé là une grande ouverture d’esprit, une ouverture sincère et respectueuse des différences. J’ai trouvé là une grande espérance.
Pour aller plus loin :
Le site https://collectif-anastasis.org
Un livre : Le Christ rouge de Guillaume Dezaunay (un des membres fondateurs d’Anastasis), Éditions Salvator
Un podcast : L’Évangile, un manifeste révolutionnaire, à écouter ICI
Merci pour cet article. Superbe initiative que ce festival et très beau foisonnement porteur d’espoir qui montre qu’il y a d’autres jeunes chrétiens que les tradi/identitaires . Peut être , toutes choses étant diffèrentes par ailleurs, les successeurs des années 2020 du CPHB . J’aurais aimé participé à la session sur «pour une théologie critique de la police «