Christophe Henning donne un compte-rendu de lecture qui va exactement dans le sens que nous souhaitions exprimer à travers ce livre : non pas une plainte contre l’injustice subie, mais une proposition ecclésiale positive, basée sur nos quarante-cinq ans d’expérience pastorale au service des valeurs évangéliques que sont l’accueil inconditionnel et l’annonce de la Bonne Nouvelle aux femmes et aux hommes de ce temps, en s’appuyant sur la créativité, l’esprit de recherche et de questionnement.
Avec le centre Saint-Merry, les fruits d’une expérience pastorale aux marges
Critique
Après quarante-cinq années d’activité, le centre pastoral Saint-Merry, à Paris, a été fermé par le diocèse. Dans un livre polyphonique, les leçons de l’aventure ecclésiale et de l’accueil inconditionnel des personnes nourrissent la réflexion pour l’avenir de communautés ecclésiales à taille humaine.
Christophe Henning, le 13/01/2022
Au printemps 2021, Mgr Michel Aupetit, alors archevêque de Paris, décidait de mettre fin à l’expérience du centre pastoral Saint-Merry. Voulu par le cardinal Marty en 1975, pour aller « aux frontières », ce centre attaché à la paroisse aurait été le lieu de conflits larvés incessants. Suite à cette décision de fermeture jugée par certains comme « autoritaire et brutale », provoquant une pétition de 12 000 signatures, on aurait pu craindre quelques règlements de comptes. Or, le livre proposé et dirigé par Guy Aurenche, ancien président de l’ACAT et du CCFD, se veut constructif. En fait, c’est davantage un « livre d’or » des faits et gestes du centre Saint-Merry, racontés par une vingtaine de contributeurs, et non des moindres, qu’il s’agisse du prêtre et sociologue Nicolas de Bremond d’Ars, du jésuite François Euvé, de l’économiste Elena Lasida ou de Mgr Albert Rouet, archevêque émérite de Poitiers.
« Pendant plus de quarante-cinq ans, le centre pastoral a tenté d’aller à la rencontre de la société contemporaine avec ses contradictions, ses limites, ses hésitations mais aussi ses richesses », résume Guy Aurenche. De cette expérience, les auteurs tirent plusieurs réflexions portant sur la coresponsabilité entre prêtres et laïcs jusque dans la liturgie ou encore l’accueil inconditionnel des personnes : « Ce lieu est nécessaire par l’appui qu’il apporte aux “proscrits” », écrit une main anonyme parmi les nombreux témoignages reçus lors de la fermeture du centre.
« L’inattendu était le quotidien »
En rêvant d’une « Église de fraternités » qui rend accessible « l’Évangile dans la ville », les contributeurs ouvrent des perspectives pastorales, fruit de cette expérimentation dans le droit fil du concile Vatican II. « À Saint-Merry, l’inattendu était le quotidien. Le renouvellement constant. La recherche brûlante, insiste la formatrice Agnès Charlemagne. Quelles portes la fermeture du centre ouvre-t-elle ? », tandis que l’aventure ecclésiale de Saint-Merry Hors-les-Murs veut s’inscrire dans la démarche du Synode sur la synodalité.
Reste à dépasser les incompréhensions pour poursuivre le rêve : « Je rêve d’une Église en recherche, qui sollicite une fraternité comme l’aumône première de la reconnaissance, écrit Mgr Rouet. Il faut que l’Église décentralise, c’est-à-dire qu’elle se regroupe par petites unités à échelle humaine (…) de petits ensembles multiples à l’intérieur desquels on puisse au moins connaître son frère. »