L’Assemblée plénière des évêques de France a eu lieu à Lourdes fin mars. Ils ont étudié les soixante propositions faites par des catholiques divers afin de lutter et d’éradiquer les abus sexuels dans l’Église. Patrice Dunois-Canette nous partage ses conclusions.
Gouvernement, services et ministères, place et rôles des femmes, sexualité, mariage, couples de même sexe… soixante propositions émises par une centaine de clercs, laïcs et personnes victimes de violences sexuelles dans un rapport, fruit de dix-huit mois de travail mais renvoi de celles qui touchent au pouvoir, à l’entre-soi ecclésiastique… Les évêques veulent-ils, peuvent-ils comprendre qu’il y a plusieurs « légitimités » dans l’Église et que celle des baptisés, si elle n’efface pas la leur, ne peut être ignorée ou mésestimée.
Veulent-ils ou peuvent-ils comprendre que leur autorité doit sans cesse se redéfinir et s’articuler à celle du peuple des baptisés pour pouvoir être acceptée, désirée, reconnue ?
En renvoyant à plus tard, plus loin, plus haut l’examen des vœux tenaces des baptisés, c’est l’impeachment[1]Le terme anglais « impeachment » signifie « mise en accusation » ou « procédure de destitution ».C’est une procédure du droit permettant au pouvoir législatif … Continue reading que les évêques risquent.
Cet impeachment qui, à l’origine, visait les abbés élus des monastères dont il semblait manifeste qu’ils n’étaient plus en état d’exercer leur mission, existe de fait quand les évêques, seuls ou collectivement, sont vus comme manifestement incapables d’exercer leur autorité. C’est un impeachment de déception, de défiance légitime, de perte de crédit, de rejet.
L’autorité épiscopale semble ne pas avoir de réelles capacités et volontés de porter ce que la reconnaissance de la crise – qu’ils ne nient pas – implique, réclame, exige.
Le peuple des baptisés ne veut pas empêcher l’exercice de l’autorité épiscopale, il veut qu’elle s’exerce.
Il ne veut pas d’une autorité sourde, verticale, autoritaire.
Il ne veut pas d’une autorité qui cherche à se faire pardonner sa faiblesse en adoptant une posture empathique, bienveillante, miséricordieuse, qui ne produit rien.
Il ne veut pas d’une autorité qui s’abrite, se protège en ne faisant rien, des injonctions et possibles remontrances de Rome.
Il ne veut pas d’une autorité paralysée par une conférence épiscopale qui serait une machine à faire rentrer qui bouge dans les rangs et faire de chacun un responsable de rien, un empêché de faire.
Il veut une autorité qui délibère avec les baptisés et agit avec les baptisés. Il veut une autorité qui s’empare vraiment des dossiers qui sont sur les bureaux depuis longtemps. Cette autorité-là doit reconnaître qu’il y a désormais plusieurs « légitimités » dans l’Église et tenir compte de la « légitimité » des baptisés. Reconnaître qu’il est grand temps d’emboîter les pas des baptisés et de ne pas sans cesse les décevoir.
Notes
↑1 | Le terme anglais « impeachment » signifie « mise en accusation » ou « procédure de destitution ». C’est une procédure du droit permettant au pouvoir législatif de destituer un haut fonctionnaire (ndlr) |
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