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Je témoigne pour faire bouger les lignes dans la communauté entre ceux qui sont convaincus que le combat des Palestiniens pour la reconnaissance de leurs droits à la terre est légitime, et ceux qui, bouleversés par le massacre du 7 octobre de 1.200 Israéliens, ne voient dans le Hamas qu’une entité islamiste et terroriste.
Je déplore les victimes et je compatis 1, mais aujourd’hui, près de cinq mois après le début du conflit, il y a 30 000 victimes palestiniennes, et un million et demi de Gazaouites déplacés qui vivent sous des tentes dans le froid, la pluie et la boue, rationnés en eau potable et en nourriture ; 80 % des infrastructures sont détruites, dont les écoles et les universités, les hôpitaux et les centres de santé, les mosquées et les églises ainsi que plusieurs sites archéologiques.
(NDLR : chiffres provisoires fournis par le Hamas, mais considérés d’un ordre de grandeur fiable par les observateurs internationaux)
À l’origine du Hamas, il y a le Sheikh Yassine, un homme paralysé des quatre membres depuis l’âge de 16 ans, devenu progressivement totalement dépendant de son entourage, qui a vécu avec sa famille dans un camp de réfugiés, puis dans une maison modeste de la banlieue de Gaza. Instituteur de formation, c’était un éducateur qui a guidé plusieurs des actuels dirigeants du Hamas dans leur choix d’études et de métier, puis d’engagement dans leur vie familiale, professionnelle et militante. Son mot d’ordre était l’unité entre les factions palestiniennes qui se combattaient souvent à Gaza 2.
À un journaliste qui lui demandait « Haïssez-vous les Juifs ? », il répondait peu de temps avant son assassinat en 2003 : « Nous sommes des fils d’Abraham et des frères. Mais si votre frère vole votre maison, que faire sinon le combattre ? »
Depuis les élections de 2008, l’administration, les systèmes scolaire et universitaire avec deux facultés de médecine, les hôpitaux fonctionnent sous la gouvernance du Hamas 3. C’est dans l’une de ces universités que Ziad Medoukh a dirigé le département de français. À côté des structures gouvernementales, l’agence de l’ONU (UNRWA – United Nations Relief and Works Agency for Palestine Refugees in the Near East) prend en charge les réfugiés palestiniens qui représentent 80 % de la population de Gaza. Elle gère des écoles et collèges ainsi que des structures de soins de santé primaires et des services sociaux.
En guise de conclusion, on peut dire que ce conflit est un conflit politique, que le gouvernement israélien et les gouvernements qui le soutiennent cherchent à transformer en conflit religieux.
Pour en finir avec lui et arriver à la paix, il faudra considérer le Hamas comme un interlocuteur. C’est ce qu’a fait de Gaulle lorsqu’il a décidé d’ouvrir des négociations avec les ‘’terroristes’’ du FLN, qui ont permis d’aboutir à la paix avec la création d’un état algérien.
Christophe Denantes,
médecin anesthésiste à l’hôpital Avicenne (Bobigny),
membre de la communauté de Saint-Merry Hors-les-Murs,
participant à des missions humanitaires à Gaza depuis 2002 en tant que médecin anesthésiste.
- Dans Souvenirs d’une religieuse, son livre posthume, Sœur Emmanuelle écrit :
« J’ai souvent pensé à cette phrase de Taine qui me parait effrayante de vérité : ‘’Grattez le vernis de cet homme civilisé, vous trouverez un gorille féroce et lubrique.’’ Je flaire en moi une affinité secrète de corruption avec mes malheureux frères humains entrainés vers le mal. Je ressens parfois dans ma chair et mon sang d’étranges fermentations. » ↩︎ - Le Hamas n’a jamais figuré sur la liste des organisations terroristes de l’ONU. ↩︎
- En effet, le Hamas est en désaccord avec l’autorité palestinienne basée à Ramallah et signataire en 1993 des accords d’Oslo qu’il a dénoncés ; mais il gouverne la bande de Gaza depuis 2007, et a remporté les élections législatives de 2008 dans les Territoires Occupés Palestiniens (comprenant la Cisjordanie, Gaza et Jérusalem-Est). ↩︎