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AG de novembre 2024 pour Saint-Merry Hors-les-Murs

Notre assemblée générale du dimanche 24 novembre dernier a rassemblé une centaine de participants, dont notre évêque, et plusieurs intervenants invités sur des sujets majeurs. Au programme : témoignages, débats, conférence et des élections pour renouveler notre équipe pastorale. Un article pour se souvenir de ces bons moments, – ou les rattraper pour ceux qui les ont manqués.

L’intitulé choisi pour cette cinquième assemblée générale hors les murs (septième en comptant les assemblées communautaires) était : une communauté envoyée, mais elle a commencé par réunir, dans la bonne humeur, une centaine de participants prêts à réfléchir ensemble à notre avenir de centre pastoral annonçant l’Évangile, à la lumière d’un passé éclairant et d’un présent stimulant.

Hors les murs

Après le rappel de l’octroi d’une lettre de mission par notre évêque, appuyée sur l’envoi des soixante-douze disciples (Luc 10), une série de témoignages de membres de Saint-Merry Hors-les-Murs ont ouvert la matinée, à partir de la question : ce « hors les murs » nous a-t-il fait vivre l’Évangile autrement, cela nous a-t-il fait bouger ?

  • Cette situation nous a obligés à nous prendre davantage en main et à être plus créatifs. Comment faire un retour dans des murs, tout en restant « hors les murs ? » Didier, Christine et Anne.
  • Dubitative au départ, je suis devenue une adepte des célébrations et des préparations en Zoom. Je suis toujours aussi agréablement surprise par les retours sur la question du partage. Claire.
  • J’ai une vraie déception à l’égard de l’Église institutionnelle, et la nostalgie des murs de Saint-Merry. S’ancrer dans un lieu permettra à d’autres de nous rejoindre, pour faire vivre cet autre courant que nous sommes dans l’Église. Isabelle.
  • L’expulsion, c’est aussi un temps de la naissance. Hors les murs, mais dans la ville et dans l’Église. Jean-Baptiste.
  • Le numérique est un outil communautaire d’avenir pour l’Église de demain. Le mot catholique (c’est-à-dire : universel) signifie aussi aujourd’hui s’organiser en réseaux fraternels et actifs. Guy.

Cette introduction nous a amenés à prolonger ce questionnement en petits groupes.

  • Notre expulsion a provoqué notre résistance face à une décision inique, rejoignant en cela nombre d’autres résistants croyants, d’autres citoyens. Elle a été réinvention, faisant vivre l’Évangile autrement, pour aller vers d’autres communautés ; un dialogue s’est instauré. Un coup de pied salutaire.
  • Être hors les murs nous a obligés à nous intégrer à l’Église diocésaine, avec les paroisses, avec qui nous avons pris contact, pas toujours avec succès – des pasteurs souvent plus à l’écoute que leurs communautés.
  • Notre expulsion nous a conduits à plus de proximité au sein de la communauté, malgré notre dispersion géographique ; impression de revivre les premières communautés chrétiennes.
  • Les célébrations eucharistiques ou en zoom ont été des temps forts, y compris lors des préparations. Elles nous ont apporté un grand bol d’air.
  • Nous sommes un épiphénomène ; nous ne voudrions pas être le dernier village gaulois face à la montée en puissance d’une chrétienté identitaire.

Intervention de Guillaume Dezaunay

James nous a ensuite présenté Guillaume Dezaunay, professeur de philosophie en lycée et en prison, auteur du Christ rouge (Salvator) qui propose une méditation politique à partir de l’Évangile, et membre d’Anastasis, – lequel organise notamment le Festival des poussières, voix dissonante d’avec le christianisme identitaire récupéré par l’extrême droite, parlant plutôt de justice sociale, d’environnement et de droits des femmes…

Hors-les-murs : une expression théologique

« Le fils de l’homme n’a nulle part où poser sa tête » ; « je suis le chemin ». Le lieu du chrétien est le déplacement, là où se font les rencontres. Au lieu de s’agenouiller dans les lieux dits sacrés, on devrait s’agenouiller dès qu’on croise quelqu’un ; car l’Évangile propose une autre définition du sacré, relatif à Dieu : pas ce qu’on ne peut toucher sans mourir, mais ce dont on doit prendre soin, les plus vulnérables (Mt25).
Madeleine Delbrêl : le Christ rencontre le Christ, dans la rencontre interpersonnelle. L’Église est partout. « La rue, où Dieu nous a placés, est le lieu de notre sainteté. »

Il y a plein d’invitations à préparer et se préparer, pour rencontrer et célébrer, dans l’Évangile.
Mais il s’agit de ne pas se laisser absorber par nos préparatifs, et que l’organisation devienne plus importante que la rencontre elle-même. Car l’écoute ne peut être préparée, elle est nécessairement saut dans l’inconnu, – « que cherches-tu ? » demande Jésus, et il y répond sans autres préparatifs -, et demande que nous fassions un certain vide en nous. « La prière est démission des pensées », disent les Pères du désert. Il s’agit d’être hors les murs de sa pensée.

Comme en Luc 9-49, où les disciples veulent interdire de chasser les démons sans autorisation de Jésus, ou faire tomber le feu du ciel sur les Samaritains, nous avons facilement une tendance sectaire au repli, à la clôture sur soi, que Jésus attaque dans l’Évangile et dans le Sermon sur la montagne. Les prophètes aussi sont envoyés aux étrangers – Naaman le Syrien. Le sens d’un groupe est à chercher hors de lui-même, et le critère est ce qu’on fait vraiment, pas ce qu’on dit. Le penchant identitaire culturel de notre Église est effrayant, cet enfermement est un contre-sens ; le christianisme est universel, ni culturel, ni impérialiste.

  • La justice : l’amour évangélique n’est pas une quête de gentillesse, mais débouche sur une réponse sociale et politique pour lutter contre les causes structurelles de l’exclusion (doctrine sociale de l’Église).
  • La liturgie : importance des partages d’Évangile, homélies collectives.
  • L’œcuménisme : il piétine ; à quand une Église post-confessionnelle, catho-protestante ?

Sur la scission entre le monde populaire et les élites, se rappeler que même si le complotisme anti-élite est irrationnel, il se fonde sur une réalité sociologique qui nécessite de vraies réformes sociales.

Sur l’utilisation de Dieu en politique : Zemmour se dit « pour l’Église, contre le Christ ! » La royauté de Dieu est un anti pouvoir, mais l’absence de pouvoir n’est pas synonyme d’absence de politique ; la notion de trône vide renvoie au pouvoir de la communauté, au pouvoir synodal ; en économie, c’est le modèle de coopérative ; le mot Église, (comme le mot soviet !), signifie assemblée, – chez les soviets, c’est le Parti qui leur a volé le pouvoir ; et dans l’Église ?

Sur la marginalisation des franges progressistes de l’Église : la notion de justice sociale est absente des formations chrétiennes, – et la JEC a été mise à l’écart quand elle a parlé de décolonisation au moment de la guerre d’Algérie. Les jeunes générations ne parlent pas d’engagement, plutôt de croisement entre Évangile et politique, ou écologie et social ; et les mouvements comme Anastasis, Dorothy, Lutte et contemplation sont plutôt ancrés dans des milieux bourgeois, contrairement au MRJC plus populaire.

Élections pour le renouvellement de l’équipe pastorale

Après la présentation orale des candidats, le bureau de vote était ouvert durant la coupure déjeuner, après l’apéritif fêtant la lettre de mission. Les résultats ont été annoncés dans l’après-midi :

  • Électeurs : 180
  • Votants : 131 (dont 90 sur place, et 41 procurations)

Nombre de voix par candidats (tous élus) :

  • Joëlle C. : 131
  • Bénédicte I.-R. : 115
  • Patricia M. : 126
  • Michel M. : 120
  • Alexandra N. : 110
  • Geneviève P.-M. : 127
  • Jean-Marie R. : 122
  • Benoît V. : 131

Intervention de notre évêque, Emmanuel Tois

Dans le (long) processus de rédaction de la lettre de mission, entre l’équipe pastorale et l’évêché, il s’est agi d’être « à l’écoute » les uns des autres.

Sur les conclusions synodales : la synodalité n’a pas besoin d’une conclusion du pape. Ce synode nous engage à travailler « à tous les étages », en concertation, en se laissant mutuellement déplacer ; c’est une manière de vivre en Église : écouter ceux qui ne pensent pas comme nous. Il fait également avancer dans le rapport hommes-femmes. Et il rappelle notre rapport au monde : nous ne sommes pas une forteresse assiégée ; mais l’Église n’a plus aucun poids dans la société. Du coup, il y a moins d’anticléricalisme et le dialogue en est facilité, – car la collusion entre État et Église (depuis Constantin) n’était pas bonne.

Saint-Merry Hors-les-Murs est en relation avec ceux qui ont un, voire deux pieds hors de l’Église. Il lui faut maintenant redécouvrir aussi le lien avec les autres chrétiens, ce qui nécessite un « déplacement ». Car il est essentiel de faire attention à l’autre, d’écouter l’autre.

Dans les questions qui ont suivi cette intervention, ont été abordées des questions tantôt très pratiques, (Pourrions-nous cohabiter dans des murs avec des protestants, ou des humanistes engagés ? L’évêché peut-il informer ses propres instances, mais également la Presse catholique, de notre appartenance au diocèse et de notre nouvelle lettre de mission ?), tantôt plus générales (Que dire du silence des évêques à l’occasion des élections et de la montée de l’extrême-droite, y compris parmi les catholiques pratiquants ?)

Cet échange s’est révélé franc, direct et fraternel, et Emmanuel Tois, que nous sommes toujours heureux d’accueillir, a proposé de relancer l’idée que notre archevêque Laurent Ulrich vienne nous confier en personne la lettre de mission, lors d’une célébration.

Quelques propositions pour l’année qui vient

  • André L. et Henri ont proposé respectivement un questionnaire sur les pratiques écologiques et une fresque du climat – reprise et détails à venir dans un prochain Flash.
  • Isabelle L. sollicite de l’aide pour les groupes Carême 2025 qui doivent s’organiser dès maintenant pour pouvoir avoir lieu : choix du thème et des textes, logistique matérielle.
  • La proposition de travail sur les Evangiles des anciens de Saint-Bernard de Montparnasse a lieu au 104 rue de Vaugirard, et a été relayée par le Flash.
  • Jacques D. a proposé une reprise des anciens Ateliers de la Verrerie, annoncé la suspension de l’atelier René Girard, et sollicité des aides à l’organisation pour continuer Dieu en question.
  • Le groupe Que sont nos amis devenus ? est toujours en recherche de parrains et marraines pour assurer le lien avec ceux qui ne peuvent ni se déplacer, ni utiliser un ordinateur.
  • Jean-Marc N. a annoncé quelques dates pour le groupe SpiFrat, qui seront confirmées et reprises dans le Flash ; on en est au 62ème cercle de silence pour un cessez-le-feu à Gaza.

Parole donnée aux deux communautés qui nous accueillent chaque mois

En mars 2021, notre paroisse a pensé que vous ne pouviez pas rester sans lieu pour célébrer Pâques, et en même temps s’inquiétait de se faire repérer comme trop progressiste en vous accueillant. La lettre de Paul aux Corinthiens, « le corps ne fait qu’un, si un membre souffre, tout le corps souffre avec lui » a fait tomber ces réticences. Ce qui a permis depuis la rencontre d’un souffle, d’un projet, et de personnes. Notre opération Hiver solidaire aurait été impossible sans votre participation. Notre créativité liturgique a été encouragée. Nous avons besoin d’être dérangés par vous ! Votre arche de Noé tangue, en attendant de toucher terre, mais arrimez-vous à la grande croix du chœur de NDE, et continuez à nous déranger !

Cette petite communauté, qui avait été très vivante dans les années 80, s’était vidée de ses jeunes. Un travail important doit continuer à être fait pour rester intergénérationnel, car c’est un signe. Expérience a été faite d’accueillir Saint-Merry Hors-les-Murs pour des célébrations ; mais, à terme, il ne serait pas durable de faire deux célébrations chaque jour de la Semaine sainte. D’autres sont également accueillis : les Baptisés du grand Paris, des groupes du 104, des charismatiques (les Filles du roi)… C’est un problème que de se rassurer dans le fonctionnement, comme pour une entreprise. « On ne se croise pas parce qu’on est pareils, mais parce qu’on est différents » ; c’est le danger des collectifs qui vieillissent ensemble : s’enfermer sur ses besoins immédiats, avoir des difficultés à accueillir d’autres. Il ne faut pas idéologiser le propos.

  • Si l’Église était une entreprise, cela fait longtemps qu’elle aurait fait faillite !
  • Aujourd’hui, l’important est d’ouvrir les yeux sur ce qui se passe, et de dire et faire ce qu’il faut en conséquence.
  • Intérêt de l’initiative Bayard et Brut : « Faut qu’on parle ! »
  • La force d’une petite communauté, faible barque par rapport aux grandes paroisses paquebots : elle rend un service complémentaire, « dans les interstices » ; elle ne va pas prendre le pouvoir sur le fonctionnement de la tête, mais elle va « calmer les arthroses ».
  • Merci de nous donner un accueil qui nous permet d’accueillir !

Célébration eucharistique

La vérité ne nous appartient pas : nous en sommes témoins, nous sommes envoyés.
Vincent M.

  • Pour l’EP partante et l’EP arrivante
  • Pour cette journée, ces paroles des intervenants, qui nous ouvrent l’avenir
  • Pour la diversité dans nos équipes ; soutenons-les pour qu’elles puissent vivre cette différence
  • Pour l’hospitalité que nous avons reçue
  • Pour les lieux interstitiels dans l’Église et dans la société, qui permettent aux blessés de se ressourcer
Blandine Ayoub

Engagée depuis plus de 40 ans dans la communauté de Saint-Merry, dans des domaines et à fonctions diverses, elle est actuellement coanimatrice de l'équipe Communication. Jeune retraitée, elle a longtemps été responsable d’un pôle de ressources documentaires dans un centre de formation professionnelle de la filière éducative et sociale.

  1. Dervin Marie says:

    Saint-Merry Hors les murs, véritable lieu de ressourcement quand on a été exclue de sa paroisse et de son diocèse pour insubordination au courant identitaire instillé depuis des années dans les diocèses du Sud.
    Mes amitiés aux chères collaboratrices de la CEPFE et à Marie-Automne !
    Merci à toutes et tous, même si je ne suis pas toujours présente aux célébrations en ligne.
    Marie

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