Trois cérémonies, cinq prêtres, des centaines de photos et de faire-part et des discours tantôt doctes, tantôt familiers et « sympa », voilà pour une dame qui meurt à 99 ans – ma belle-mère.
À quelque temps de là, mon amie athée nous quitte, comme on dit pudiquement. Ses filles, également athées, organisent une belle cérémonie au crématorium. Je m’attends à une prise de parole radicalement différente et je tombe des nues lorsque j’entends dans la bouche de ses enfants qu’Odile est allée retrouver son époux décédé trois ans plus tôt.
Certes il faut s’attendre à tout lorsqu’il s’agit d’hommages à nos disparus. Mais je me pose la question : moi qui crois en la vie que dit l’Évangile, vie en surabondance ici et maintenant, je me demande comment je puis la partager pleinement avec mes proches avant que l’absence de vie physique ne nous sépare définitivement.
Je pense aussi à tous nos frères humains qui, eux, sont restés sans sépulture et sans cérémonie. Qu’ils fassent l’objet du travail que le Père Desbois effectue afin de mettre au jour les corps des juifs assassinés dans la Shoah par balles, ou celui des ONG auprès des exilés noyés dans ce qu’il est convenu d’appeler la fosse commune de notre mer Méditerranée.
Telles sont les pensées qui m’habitent lorsque j’assiste à des obsèques et que j’entends toutes sortes de discours dogmatiques convenus – voire de lieux communs laïques dans lesquels nous nous réfugions pour masquer notre angoisse de la mort, au lieu de célébrer la vie en plénitude.
Pourquoi la noble énigme de la vie et de la mort devrait-elle se trouver ainsi ravalée au rang de pieuses bondieuseries ?
Catherine Busson