Mais où irions-nous, Seigneur ? C’est la question que je me pose et qui me poursuit depuis l’annonce de la fermeture de notre Centre Pastoral. Et pourtant, bien sûr, Saint-Merry ne prétend pas détenir “les paroles de la vie éternelle” !! J’ai reçu une solide éducation religieuse à laquelle je suis restée fidèle. J’ai toujours pensé que le Christianisme (sinon le catholicisme) était, selon l’expression d’un ami philosophe, ma “langue maternelle du sens.” Et cette langue, je l’aime. Je n’ai cessé de la cultiver avec plus ou moins d’ardeur, selon les périodes de ma vie, les rencontres, les engagements et les différentes paroisses d’appartenance.
C’est à notre retour à Paris, dans les années 90 que mon mari et moi-même avons découvert Saint-Merry : ce fut un “coup de foudre”, disons plutôt une évidence. Cette belle église, au cœur de Paris, à proximité de Beaubourg et du Marais… Ce lieu de rencontre entre église et société, entre la rue et “la Gloire”, à travers l’art contemporain, avec au plus profond, le souci des pauvres, des migrants et des exclus. Dans le sillage du concile, de Mgr Marty et de Xavier de Chalendar, nous voilà embarqués à Saint-Merry, en quête de coresponsabilité et d’ouverture au monde. Et c’est là, qu’avec mes compagnons de route, je peux partager mes questions, mes étonnements, mes émerveillements, mes doutes et mes révoltes. C’est là que dimanche après dimanche, au cours des messes préparées ensemble, je redécouvre la parole et les textes d’évangile, comme s’ils étaient nouveaux, tout en vibrant, à l’écoute des chants de notre généreuse et talentueuse équipe de chanteurs.
Saint-Merry c’est aussi :
– accueillir, portail grand ouvert sur le tumulte de la rue, le passant, le touriste, le tout-venant, pour me mettre à son écoute ;
– me laisser surprendre et parfois séduire par les expositions d’art contemporain ;
– nous retrouver, nous reconnaître, nous confronter, jusqu’à la rédaction de notre propre Credo lors des groupes “Carême” ;
– vivre pleinement des moments exceptionnels comme “l’Homme debout” ou les “Nuits sacrées”.
Et plus personnellement, plus intimement, c’est “l’éveil à la foi” partagé avec mes petites filles, c’est la joie d’un baptême, le bonheur d’un mariage et l’émotion des funérailles d’un époux.
“À qui irions-nous Seigneur ?” Seigneur, si je te cherche inlassablement partout, et aussi ailleurs, hors Saint-Merry (lors de vacances ou de voyages), c’est que je me sens nourrie et fortifiée dans ma quête spirituelle par ce que je vis au sein de ma chère communauté
Odile Guillaud
Engagé dans une autre paroisse, je viens rarement à Saint-Merry, mais toujours quand je suis accompagné de jeunes ou d’amis qui ne sont pas du sérail. Pour eux la parole est vivante, actuelle, radicale. La communauté est manifestement heureuse et chaleureuse, et tous les vents qui agitent le monde y sont accueillis sans crainte. À chaque fois, comme ma première messe, une liberté des premiers âges, une jubilation.
Benoît Roederer
Aux vents du monde, tel était le titre de notre premier enregistrement des chants composés à Saint-Merry (il y aura trois autres CD par la suite). Car Saint-Merry a été pour moi et pour quelques autres (avec une mention spéciale à Léandre Boldrini pour toutes ses musiques inspirées) un lieu unique dans la mesure où il m’a permis de participer à la création liturgique. Mais l’écriture des chants ne fut jamais que l’expression de ce qu’échangeaient les membres de la communauté lors des préparations ou l’écho des prises de parole dominicales. Ces mots de la foi ne reflètent pas seulement d’abord la mienne mais bien celle des priants et des témoins du dimanche. Comme l’animation assurée fidèlement par le groupe Chant, ces propositions musicales relèvent du seul service. C’est pourquoi, je rends grâce d’avoir pu vivre cette expérience si forte, si décapante parfois, offerte et renouvelée, de l’avoir partagée avec beaucoup d’autres à travers la France lors de nombreux week-ends de rencontre. Je rends grâce aussi à cette communauté qui, dans la liberté, a permis, a accueilli et accueille ce que chacune et chacun portent et peuvent offrir, selon leur charisme souvent révélé par l’invitation confiante à découvrir et à exprimer ce que nous possédons au plus profond de nous et qui, traduit en actes, devient aussi un témoignage.
Alain Cabantous
C’est un lieu tellement ouvert ! vivant ! accueillant ! surprenant ! enthousiasmant ! Qui donne envie d’y passer un moment pour échanger, c’est un lieu essentiel.
Claire Deffontaines
Mettre fin brusquement au Centre Pastoral Saint-Merry, c’est ne pas reconnaître l’existence d’une Église postconciliaire, d’une Église accueillante à ceux qui sont en recherche, d’une Église proche de ceux qui en sont les plus éloignés. Guy-Marie Riobé, ancien évêque d’Orléans et proche du Cardinal Marty, disait il y a plus de 40 ans : « Au nom de la fidélité à l’Évangile, donnons priorité à ceux dont l’Église est loin, ceux qui sont en recherche de communautés fraternelles, en recherche d’une nouvelle façon de vivre leur foi. Seules des communautés vivantes, dynamiques et priantes, présentes aux transformations de la société, confrontées aux événements, capables de réinterpréter pour aujourd’hui le message des Apôtres, rendront crédible l’Église du Christ. Le printemps de l’Église est à ce prix. » Face à ces événements récents, puissions-nous méditer cette parole prophétique et toujours d’actualité, pour construire et faire vivre l’Église d’aujourd’hui et de demain.
Bernard de Lannoy
Les forces de l’Esprit du Christ me semblent être là… et fermer cette porte grande ouverte risque de ne pas servir l’Évangile. Je reste définitivement fidèle à mon Église à laquelle je souhaite d’avancer vers le Grand Large au lieu de rester arrimée à un passé riche et respectable certes, mais en partie révolu.
Maguy Sauvagnac
Le pluralisme dans l’Église me semble être un ferment essentiel à son maintien et à sa fécondité.
Christine Faget
Venant à Saint-Merry depuis la grande banlieue, j’ai participé au groupe très vivifiant de lecture des psaumes à partir de l’hébreu et à divers événements qui s’y sont déroulés. J’ai assisté notamment à une pièce de théâtre qui se tenait dans le carré de l’église. J’y ai alors découvert et compris combien l’Église est un lieu où tout de l’homme peut s’exprimer, en proximité avec Celui qui a pris notre humanité pour la restaurer dans Son Amour. J’ai aussi participé à plusieurs Nuits Sacrées, avec la joie de voir des hommes de bonne volonté se retrouver pour dire leur foi dans l’accueil et le respect mutuel de leurs croyances. J’ai toujours considéré Saint-Merry comme un lieu où vit l’Église des baptisés, celle dont les participants se tiennent au cœur du monde, et cherchent à adorer « en Esprit et en vérité ».
Claire Michelis Roullaud
Des célébrations remplies de la force inconditionnelle du Christ.
Maguy
Le Centre Pastoral de Saint-Merry, une fabrique de discernement et d’humanité
qui faire vivre la Parole de Christ.
J’y ai expérimenté l’écoute, le respect des convictions des autres et leurs richesses, la recherche exigeante d’authenticité, la coresponsabilité dans les lieux où je me suis impliqué (notamment l’atelier familles, ouvert à tout type de familles, le groupe partage des évangiles, l’équipe communication), la célébration en commun de ces diversités de vécus et d’engagements, prenant tout son sens dans le partage du pain, empreinte du Christ ressuscité.
L’écoute patiente et le partage ne vont pas de soi, surtout quand nos convictions diffèrent. Découvrir derrière les certitudes et doutes de chaque personne, qu’ils sont issues d’histoires personnelles respectables et fort différentes, de maturation par la fréquentation de « passeurs » (pasteurs, théologiens, philosophes, militants…), amène chacune et chacun à dépasser ses propres convictions pour co-construire, qu’il soit clerc ou laïc.
Par ailleurs, je me dois de témoigner de la recherche d’authenticité d’ami(e)s et enfants sur le parvis, en rupture avec l’Église institution, alors qu’ils adhérent aux « valeurs » des évangiles ; c’est pour moi une souffrance et un gaspillage qui ne peut être accepté.
En un mot Saint-Merry ne nous a pas appris à clamer la Vérité et à s’y soumettre mais à décrypter ce à quoi aujourd’hui la Parole du Christ nous appelle (Lui seul est chemin et Vérité à découvrir ensemble). Manifestement aussi à plus d’humanité, notamment dans la ligne du pape François.
C’est à partir de ce socle que nous célébrons ensemble l’eucharistie, différents mais réunis en Christ. Ce qui nous conduit inévitablement à trouver les mots d’aujourd’hui pour célébrer, en puisant bien sûr dans ce que nos « anciens » dans la foi nous ont transmis de plus essentiel.
Saint-Merry, c’est aussi pour moi, et certains d’entre nous, l’expérience de la coresponsabilité, un chemin peu facile, qui écarte ou atténue les égos en recherche de pouvoir (plus ou moins consciemment). Ne soyons pas naïfs, nous avons connu et connaitrons encore ces conflits d’abord fondés sur nos égos. Mais là n’est pas l’essentiel. Être capable de murir en commun réflexions et décisions est précieux dans notre société très focalisée sur l’accomplissement individuel, oubliant trop souvent ses responsabilités vis-à-vis des autres humains. Le CPHB nous le rappelle et nous donne la possibilité de nous y employer dans les nombreux groupes « caritatifs » en place, dans la conduite d’actions communes dont la préparation des célébrations.
André Letowski
Ayant eu l’occasion de jouer plusieurs fois à Saint-Merry, la dernière fois c’était “Ce que Dieu entend” d’après les textes de Christian de Chergé avec Nazim B., pensionnaire de la Comédie Française devant un parterre comble. Ce serait plus que dommage d’arrêter ce courant culturel, artistique et spirituel dans Paris.
Iris Aguettant, comédienne
La pluralité des sensibilités et des façons de témoigner de l’évangile est essentielle à la vitalité de l’Église.
Clémence Maillot
Je suis touchée et affectée par cette décision en haut lieu de la fermeture du centre de Saint-Merry, véritable laboratoire vivant et créatif qui travaillait à vivifier l’Église et à la transformer en profondeur. Je souhaite qu’un dialogue ouvert puisse s’opérer et que chacun parvienne à comprendre l’autre, en allant au-delà toujours du comportement de l’autre.
Ce qui est réel c’est le flux, c’est la continuité de la transition, c’est le changement lui-même.
Catherine Collin
Porque el Espíritu del Vaticano II, y del Cardenal Marty,
ayuden y acompañen en la renovación que necesita nuestra Iglesia.