Le quotidien La Croix, qui n’est pas un journal spécialement anticlérical ni de mauvaise foi systématique contre l’Église catholique romaine, a publié le 14 juin dernier un article édifiant sur les méfaits de l’évêque d’Avignon, qui vient enfin de prendre sa retraite après dix-huit années catastrophiques où, (d’après La Croix, donc), il a pu n’en faire qu’à sa tête, maltraitant les prêtres, méprisant les laïcs, et vidant inconsidérément les caisses – au vu et au su de toute la hiérarchie, et alors que les uns et les autres appelaient vainement au secours toutes les autorités possibles. Le lendemain 15 juin, même journal, autre scandale : le maître des études de la congrégation Saint-Jean, accusé d’abus sexuels sur les novices depuis trente ans, (trente ans !), est enfin « renvoyé de l’état clérical ». Le temps de Dieu n’est pas celui des humains, et je conçois même que le temps de l’Église ne soit pas celui d’une entreprise lambda. Mais quand même, on ne peut pas nier qu’il n’y ait un grave problème de gouvernance dans notre Église.
Dans un article connexe (le 14 juin), Arnaud Join-Lambert, professeur de théologie à l’Université de Louvain, constate benoitement qu’il n’y a pas vraiment de contre-pouvoir face à celui de l’évêque dans l’institution ecclésiale, et en gros que nul ne peut l’obliger à se retirer, quels que soient ses méfaits éventuels. Au niveau local, par ailleurs, on nous explique que le curé est maître chez lui, et l’on constate que cette réponse est systématiquement opposée par les évêques chaque fois que des paroisses sont vent debout contre leur responsable (comme j’en ai personnellement connu plusieurs cas ces quinze dernières années). Parallèlement, il semble qu’il ne reste plus qu’une seule équipe pastorale élue à Paris, par exemple, l’ensemble des autres conseils pastoraux étant cooptés ou nommés par le curé, et réduits à un rôle de conseil n’obligeant en rien à suivre leurs avis sous forme de décisions. Résumons-nous : dans cette pyramide infernale, chaque petit ou grand chef peut, s’il le souhaite, n’en faire qu’à sa tête, comme il veut, quand il veut, et pendant le nombre d’années qu’il veut pour ce qui est des grands chefs, sans contre-pouvoir effectif avéré. Et on s’étonne qu’il y ait des abus, et on se désole que les églises se vident…
Oui, cher pape François, ta proposition de démarche synodale est plus que bienvenue ! Les Australiens comme les Allemands ont déjà commencé à réfléchir sérieusement en ce sens en devançant les incitations et le calendrier romain. Mettons-nous au travail, chrétiens du XXIème siècle : le message de l’Évangile est toujours d’une brûlante actualité, il s’agit juste d’adapter nos outils et structures pour qu’au lieu de transformer notre Église en repoussoir, ils nous permettent de porter au mieux la Bonne Nouvelle à nos frères et sœurs humains.
Blandine Ayoub