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Hommage aux morts de la rue

Vivre à la rue tue ! Le collectif « Les Morts de la Rue » honore ces victimes, devenues souvent invisibles, en accompagnant leurs obsèques, et affiche sur son site cette phrase qui nous renvoie tous à notre humanité : « En interpellant la société, en honorant ces morts, nous agissons aussi pour les vivants ».
Jean-Louis nous fait part de son expérience.

Souvent, on m’interpelle en disant « tu ferais mieux de t’occuper des vivants » ! Est-ce utile de s’impliquer et de s’engager du côté des morts ? Le collectif des morts de la rue est un collectif d’associations qui luttent pour la dignité des personnes dans la société ; cela va du droit au logement à la recherche de travail avec toute la panoplie de l’activité des travailleurs sociaux.

La création du collectif vient du constat d’un manque. La dignité dans la mort fait partie de nos marqueurs culturels : « il ne sera pas enterré comme un chien ». Par ailleurs, une personne ne nait pas SDF et si l’absence de domicile a été un trait d’un moment de sa vie, la personne ne se réduit pas à l’étiquette sdf mais les conditions et l’âge au moment du décès sont des indicateurs de modes de vie et d’histoires souvent douloureuses et ô combien humaines.

Il me semble que l’engagement majeur du collectif est de donner toute sa  dignité à la personne au moment de la fin de son passage sur terre et de rappeler que nos espaces de vie sont marqués par l’injustice et le manque de solidarité. Quand nous faisons l’hommage annuel aux morts de la rue, il ne s’agit pas de banaliser ces conditions de vie et de mort et de ritualiser l’évènement mais de rappeler que derrière ces morts, il y a des personnes, des parcours de vie et des insuffisances politiques dans le devoir de solidarité.

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Pour ma part, j’accompagne au cimetière de Thiais les personnes isolées (pas forcément à la rue ; il y a beaucoup de personnes isolées et c’est une forme de précarité majeure dans notre société), décédées à l’hôpital mais qui n’ont personne, ou dont le corps a été rapatrié à l’Institut médico-légal. Personne ne réclame la dépouille et les services d’identification à l’hôpital ou à l’IML n’ont trouvé personne pour recevoir et accueillir la dépouille.

Nous allons à l’hôpital ou à l’IML nous recueillir devant la dépouille de la personne, et j’aime beaucoup voir le visage des personnes concernées car on passe d’un mort parmi d’autres à une personne unique, puis nous partons dans la voiture des pompes funèbres jusqu’à Thiais (des personnels qui ont tant besoin d’être reconnus). Nous prenons des fleurs et, au moment de l’inhumation, nous faisons un éloge à partir des quelques renseignements que nous avons ou parfois même de… rien (même pas un prénom, des dates et des lieux), et puis nous lisons un poème pour clôturer l’hommage. Nous sommes toujours deux car nous représentons la société. Pas de mots ou de texte religieux car l’engagement et l’hommage sont civils. À chaque fois, je sors de ce moment très ému, comme un moment unique et nous conversons avec l’autre volontaire sur la rencontre que nous avons faite. Pour ma part, je fais environ un hommage par mois et chaque hommage est un très grand moment d’humanité ; j’associe des amies et amis de Saint-Merry Hors-les-Murs pour partager aussi ce magnifique moment d’humanité.

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« Chacun était quelqu’un. »

« Ces personnes n’étaient pas que sdf. »


« Restons bien attentifs aux vivants. »


« Agissons ensemble pour que cessent les arrivées en rue…
et pour qu’il soit possible de sortir de rue autrement que par la mort ».

Jean-Louis L.

CategoriesSolidarité
  1. Jean Verrier
    Jean Verrier says:

    Cher Jean-Louis, comment peut-on mettre en question ton engagement? Très sincèrement je te suis reconnaissant d’associer tes amis de Saint-Merry, de m’associer, à l’hommage mensuel que tu rends aux Morts de la rue. Merci.

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