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Je ne crois pas en Dieu, le Père tout puissant

Pour la seconde fois de ma vie, j’ai vécu une naissance à Noël. Pas celle de l’enfant de la crèche, celle d’un enfant ordinaire. La première, il y a quarante-sept ans, celle de mon dernier fils. La deuxième, ce Noël-ci, celle de ma dernière petite fille. Rien de plus courant, rien de plus questionnant, pourtant.

Noël, c’est tous les ans. On nous dit la paix aux hommes bien-aimés de Dieu, on nous dit une grande joie pour tout le peuple, on nous dit sauvés. 
La paix, où est-elle ? Dans les pays ravagés par les rafales d’armes à feu ? Dans les camps de réfugiés qui ne savent plus comment se protéger ? Dans les quartiers délaissés où des jeunes se perdent ou perdent la vie ? Dans les familles qui se déchirent ?
La joie, où est-elle ? Dans les yeux des exilés qu’on refuse d’accueillir ? Sur les visages de ceux qui dorment dans les rues ? Dans les cris des jeunes qui accusent les générations précédentes d’avoir dévasté la planète ?
Sauvés ? Nous sommes souvent bien plus perdus sur les chemins de la vie que sauvés de leurs embûches.

Et voilà qu’un fœtus arrive à terme. Un bébé advient, comme une aurore au milieu des tremblements du monde. Dans notre monde fatigué et entravé, une immensité de possibles s’ouvre, une espérance en personne.
Ce qui touche d’abord, c’est l’impuissance, la fragilité de cet être tout neuf, si léger, si petit, un souffle mais le souffle de la vie. Puis cet abandon, cette confiance totale en les bras qui le soutiennent, le nourrissent, le réchauffent, en les voix qui lui susurrent une tendresse infinie.

Une naissance, à Noël, donne d’autant plus à penser à ce Jésus « fils unique de Dieu, Dieu né de Dieu, vrai Dieu né du vrai Dieu, engendré non pas créé, de même nature que le Père…. Qui a pris chair de la vierge Marie et s’est fait homme. »
Dieu, ce nourrisson né en Palestine sous l’empereur César Auguste dont des textes écrits à postériori nous racontent un début …fabuleux ? Prétendre qu’un être si vulnérable est Dieu met à terre toute l’histoire des Zeus, des Jupiter, Baal, des dieux forts, dominants, puissants. Avec le bébé Jésus, Dieu choisit une nouvelle façon d’être avec les humains. Il sait ce qu’est être humain, faible, sensible, limité.
Avec le bébé Jésus, Dieu est devenu un humain.

Lorsqu’un bébé vient au monde, les familles cherchent les ressemblances. Jésus ressemble-t-il à Dieu comme un fils à son père ? Adulte, il assurera ne faire qu’un avec lui. Alors, c’est sûr, Dieu n’est pas tout puissant.
On nous dit : « c’est en amour que Dieu est tout puissant ! » Qui a déjà vu un père ou une mère tout puissant en amour ? Être père, être mère, c’est s’inquiéter. Aux premiers jours d’un enfant, s’il pleure on craint qu’il souffre, si on ne l’entend pas, on court vérifier qu’il est encore en vie. Être père, être mère, c’est tenter d’insuffler ce qui fait sa joie d’être vivant, son bonheur de vivre. Un parent ouvre des possibilités devant ses enfants, pas un programme d’assurance bonheur. Il leur laisse la liberté de choisir. Il ne peut pas faire le bonheur de ses enfants aussi fort que soit son amour.

Bébé, puis tout au long de sa vie, Jésus dessine ce qu’est un être humain. En le regardant à la crèche puis devenu adulte, on découvre ce dont on est capable, qui on est, ce qu’est un humain “réussi“.
Comme si, avec Jésus, l’être humain pouvait devenir Dieu…

Tel fut mon Noël 2023.

jochabert
Joëlle Chabert

Joëlle Choisnard Chabert, géographe et journaliste retraitée. Autrice d’ouvrages pour adultes et pour enfants édités chez Bayard France et Canada, Salvator, Albin Michel. Thèmes : société, christianisme, vieillissement.

  1. DRISIN Philippe
    DRISIN Philippe says:

    Bonjour Madame,
    Je partage votre questionnement. J’ai tenté d’y apporter une réponse, ma réponse en tout cas, dans un petit livre que j’ai écrit récemment “Dieu a-t-il un plan ?” (taper ce titre sur google). Philippe DRISIN

  2. DRISIN Philippe
    DRISIN Philippe says:

    Bonjour Madame,
    Avez-vous pu prendre connaissance de mon livre ? si oui, merci de me donner votre avis. Philippe Drisin

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