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Dimanche 7 avril 2024. « Alors que les portes étaient verrouillées »

Comment résonnent aujourd’hui en nous les dires de Luc dans les Actes des Apôtres sur la façon dont se sont organisées les premières communautés de croyants ?
Notre communauté n’est pas un isolat dans le monde même si, comme les disciples, nous avons, collectivement ou individuellement de bonnes (ou de mauvaises) raisons de nous barricader, prisonniers de nos peurs, de nos doutes et de nos déroutes. À la suite de Thomas, déverrouillons nos cœurs, ouvrons les portes, laissons-nous saisir dans la foi.

P. HERSANT Instants limites, pour chœur mixte et instruments ad libitum: lX. Ballon prisonnier

Nous venons de célébrer la résurrection, ensemble à Notre-Dame d’Espérance, ailleurs dans Paris ou en province et nous nous retrouvons ce dimanche remplis de cette Espérance que le tombeau vide ouvre à une vie nouvelle ici et maintenant.
Alors bienvenue à tous, à vous qui nous rejoignez peut-être pour la première fois, aux habitués, à vous qui connaissez Saint-Merry Hors-Les-Murs depuis peu – pour partager la Parole et prier ensemble ce matin. Est-ce seulement parce qu’à la suite des apôtres, nous sommes réunis en son nom ce matin que nous formons une communauté ? À l’heure où la nôtre est fragilisée par l’attente, s’interroge sur son avenir, comment résonnent aujourd’hui en nous les dires de Luc dans les Actes des Apôtres sur la façon dont se sont organisées les premières communautés de croyants ?
La nôtre n’est pas un isolat dans le monde même si, comme les disciples, nous avons, collectivement ou individuellement de bonnes (ou de mauvaises) raisons de nous barricader, prisonniers de nos peurs, de nos doutes et de nos déroutes. Néanmoins, même au creux de nos refus, les signes sont là, pour que nous croyions que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, et pour qu’en croyant, nous ayons la vie au nom du Père, du Fils et de l’Esprit.

Bénédicte I.-R.

C’était après la mort de Jésus. Le soir venu, en ce premier jour de la semaine, alors que les portes du lieu où se trouvaient les disciples étaient verrouillées par crainte des Juifs, Jésus vint, et il était là au milieu d’eux. Il leur dit : « La paix soit avec vous ! » Après cette parole, il leur montra ses mains et son côté. Les disciples furent remplis de joie en voyant le Seigneur. Jésus leur dit de nouveau : « La paix soit avec vous ! De même que le Père m’a envoyé, moi aussi, je vous envoie. » Ayant ainsi parlé, il souffla sur eux et il leur dit : « Recevez l’Esprit Saint. À qui vous remettrez ses péchés, ils seront remis ; à qui vous maintiendrez ses péchés, ils seront maintenus. » Or, l’un des Douze, Thomas, appelé Didyme (c’est-à-dire Jumeau), n’était pas avec eux quand Jésus était venu. Les autres disciples lui disaient : « Nous avons vu le Seigneur ! » Mais il leur déclara : « Si je ne vois pas dans ses mains la marque des clous, si je ne mets pas mon doigt dans la marque des clous, si je ne mets pas la main dans son côté, non, je ne croirai pas ! » Huit jours plus tard, les disciples se trouvaient de nouveau dans la maison, et Thomas était avec eux. Jésus vient, alors que les portes étaient verrouillées, et il était là au milieu d’eux. Il dit : « La paix soit avec vous ! » Puis il dit à Thomas : « Avance ton doigt ici, et vois mes mains ; avance ta main, et mets-la dans mon côté : cesse d’être incrédule, sois croyant. » Alors Thomas lui dit : « Mon Seigneur et mon Dieu ! » Jésus lui dit : « Parce que tu m’as vu, tu crois. Heureux ceux qui croient sans avoir vu. » Il y a encore beaucoup d’autres signes que Jésus a faits en présence des disciples et qui ne sont pas écrits dans ce livre. Mais ceux-là ont été écrits pour que vous croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, et pour qu’en croyant, vous ayez la vie en son nom.

Photo Jean Wimmerlin Unsplash
Photo Jean Wimmerlin Unsplash

Jean-Luc Jacquenot / Bernard Quenot / Studio SM

Dieu nous parle par son absence
Lorsque les mots ne pourraient pas.
L’esprit souffle dans le silence
Là ou les mots n’ont plus de voix.

Absurdite

1/ Ouvrez les portes du silence : l’Esprit vient vous parler
Par delà les cris de la violence et de l’absurdité.
Ouvrez les portes du silence : La parole se tait…

2/ Suivez les sentiers de la peine : l’Esprit vient vous sauver
Il est là, déjà il vous entraîne où vous n’osiez aller.
Suivez les sentiers de la peine : La parole se tait…

Aube

3 / Passez au désert des souffrances : l’Esprit vient vous guide
Aux chemins de nouvelles naissances vers des sources cachées
Passez au désert des souffrances : La parole se tait.

4/ Marchez dans la nuit de l’absence : l’Esprit vient vous brûler
Au brasier du matin qui s’avance pour tout renouveler.
Marchez dans la nuit de l’absence : La parole renaît…

Alors que les portes sont verrouillées, Jésus est là…

Cette phrase lu et relue au fil des années a résonné très fortement lors de la réunion de préparation. Je pense même pouvoir dire qu’elle m’a saisi… Car, tel un acte de foi, « oui, je crois cela », elle ravivait l’espérance.

Les portes ont beau être fermées, légitimement, pour se protéger, mais aussi parfois pour rester bien tranquille, rester entre soi, avec des certitudes à ne surtout pas bousculer, et garder l’autre bien à distance, Jésus nous rejoint là où nous sommes.

En écrivant ces quelques lignes, je suis saisi par le souvenir de ces femmes et de ces hommes qui, au nom de leur foi chrétienne, ont perturbé avec violence il y a plus de dix ans maintenant les représentations de la pièce de Romeo Castellucci, « Sur le concept du visage du fils de Dieu ». Moi, cette pièce, elle m’avait ébloui. Peu avant, vous vous en souvenez sans doute, au Brésil, une femme était excommuniée par l’Église catholique parce qu’elle avait fait avorter sa fillette de 9 ans, enceinte de jumeaux après de multiples viols par son beau-père. « Le viol est moins grave que l’avortement » avait osé cracher l’archevêque de Recife pour justifier, avec l’appui du Vatican, l’excommunication de la mère et du corps médical, mais pas du beau-père… Cet archevêque avait été nommé dans les années 80, pour succéder à Dom Helder Camara…

Où étaient passées les phrases fortes de Jean Paul II de 1978 – j’étais encore un enfant, qui allait faire sa première communion -, mais elles m’avaient marqué, emporté, vivifié : « N’ayez pas peur ! Ouvrez, ouvrez toutes grandes les portes au Christ. » Où sont-elles passées ces phrases fortes qui résonnent avec les paroles de l’Évangile d’aujourd’hui : « La paix soit avec vous ! De même que le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie ». Jésus nous envoie affronter les réalités d’aujourd’hui, la complexité de la vie humaine, la violence de la vie humaine, celle des violeurs comme celle des intégristes. Et pas seulement leurs pailles, leurs poutres, leurs verrous mais aussi mes pailles, mes poutres, mes verrous.

Nous sommes, chacune et chacun, empêtré.e.s dans nos contradictions, capables d’annoncer l’Évangile et de ne pas regarder notre frère, notre sœur couché.e.s sur le trottoir ; capables de partager le pain et de juger abruptement et condamner.
Pourtant, quand on ouvre les portes, celles des maisons, celles du cœur, des oreilles, des yeux, celles des certitudes et des rituels, et qu’on laisse l’autre y entrer avec ce qu’il est, sans doute pouvons-nous espérer avoir la vie en abondance, « la vie en son nom ».
Mais ce qui me garde dans l’espérance d’un vent nouveau, c’est que même quand les portes sont verrouillées, même quand on peine à faire de la place, même quand on a peur, Jésus se tient là.

Benoit V.

BLOW : Vénus et Adonis – ouverture

Photo Dima Pechurin Unsplash
Photo Dima Pechurin – Unsplash

Le passage des Actes des apôtres que nous allons lire est en quelque sorte la concrétisation dans la vie quotidienne de l’envoi des disciples par Jésus.
Le mode de vie qui nous est proposé apparaît d’une très grande simplicité, voire d’une certaine légèreté, ce qui ne veut pas dire qu’il soit facile à mettre en œuvre. En réalité, ce partage de tous les biens n’est pas une vaine chimère de doux rêveurs. Il n’est possible que parce que préexistent au-dessus de tout le don de la grâce et le témoignage de la résurrection du Seigneur Jésus.
Mais ce faisant, ce passage nous éclaire aussi sur ce qui constitue une communauté chrétienne. Une communauté, ce n’est pas uniquement ce que nous faisons ensemble. Ce ne sont pas uniquement des règles de vie commune que nous choisissons. En réalité, la communauté n’existe que parce que quelque chose de plus grand nous dépasse et dépasse chacun de ses membres. Ainsi, nous pouvons dire que nous nous recevons comme communauté donnée par l’Esprit. Dans la communion au corps et au sang du Christ, nous devenons ce que nous recevons.
Dès lors, nous ne pouvons pas être propriétaire de la communauté, car par construction, la communauté n’est la propriété de personne

Vincent M.

La multitude de ceux qui étaient devenus croyants avait un seul cœur et une seule âme ; et personne ne disait que ses biens lui appartenaient en propre, mais ils avaient tout en commun. C’est avec une grande puissance que les Apôtres rendaient témoignage de la résurrection du Seigneur Jésus, et une grâce abondante reposait sur eux tous. Aucun d’entre eux n’était dans l’indigence, car tous ceux qui étaient propriétaires de domaines ou de maisons les vendaient, et ils apportaient le montant de la vente pour le déposer aux pieds des Apôtres ; puis on le distribuait en fonction des besoins de chacun.

La foi en Jésus-Christ a une dimension personnelle, mais cette foi prend corps dans une communauté qui nous est donnée et que nous recevons par l’Esprit. Une communauté locale, à laquelle nous sommes habitués. Une communauté universelle, qui rassemble celles et ceux qui partagent la même foi, même si leurs modes de vie, leurs rites sont différents. Quelle est cette communauté que nous recevons ?
Voilà la question sur laquelle nous vous proposons de partager.

Vincent M.

Quelle est cette communauté que nous recevons ?

BACH : Canonic trio

Christ Aux 1000 Visages
Christ aux mille visages
  • En voyant tous ces visages sur l’écran, toute cette communauté que je reçois, je pense que chacun s’est arraché à son quotidien ce matin pour être là…. et nous voici tous ensemble, poussés par l’Esprit, merci d’être là
  • Avec cette chance d’être hors-les-murs, nous découvrons d’autres communautés avec leurs personnalités, leur vie propre et nous en faisons partie parfois aussi.
  • Avec les textes de ce matin, si nous voulons avoir accès à la Parole, à ce qu’elle veut nous dire, il nous faut le faire avec d’autres personnes, d’autres communautés qui ont tant à nous apporter pour aller au coeur de l’évangile.
  • Le baptême inscrit un enfant dans plus large que sa cellule familiale. Avec la Visio, et au fur et à mesure de la vie, la communauté s’élargit…. ceux avec qui je sens une commune humanité…. avec qui on tisse des liens, surtout quand on n’a plus de lieu…. oui prendre soin de ces liens qui font la communauté.
  • La communauté que je reçois, c’est le Corps du Christ universel, je me sens très ouvert à tous les hommes dans l’espace et dans le temps…, au-delà du seul cercle chrétien. Le baptême me fait sentir toute l’Humanité comme une fraternité, comme un seul corps ; c’est cela qui m’est offert par l’évangile
  • Une communauté plus ouverte que les seuls croyants. Par notre engagement politique, on essaie de construire le Royaume de Dieu, avec des non-croyants qui, eux, veulent améliorer le bien-être et la vie des gens… les textes où les premières communautés mettent tout en commun, c’est le principe de la sécurité sociale
  • CVX, St Merry, Chrétiens en recherche 81, toutes ces communautés m’aident à découvrir le sens de la Parole et c’est important pour moi.
  • Dans une réunion cette semaine sur la prière, on a évoqué des façons bien différentes de prier, mais quand on descend chacun.e profond dans son intériorité, on rejoint la “nappe phréatique ” qui nous relie tous. C’est une belle image de communauté.
  • Nous sommes un peu isolés en ce moment, obligés de rester chez nous… mais nous recevons beaucoup d’appels ou de visites. Je suis heureux de voir tous ces visages différents et quand ces appels nous parviennent, j’ai l’impression que c’est une même voix, une même personne qui nous rend visite.
  • Nous faisons partie du même peuple de Dieu ; quand je ne suis pas avec vous, je participe au culte anglican avec une amie luthérienne… j’étais très touchée de cet œcuménisme…. je me sens faire partie du “peuple de Dieu”, international et universel.
  • La communauté qui nous est présentée aujourd’hui est une communauté qui a peur, qui est enfermée et rendue ainsi impuissante. Alors que la communauté du Ressuscité est appelée à reprendre à son compte cette mission dans le monde, qui sort en dehors de la salle fermée vers la Pentecôte ; comment sommes-nous les héritiers de cette mission du Christ d’annonce de la Bonne Nouvelle ?
  • Pour rebondir sur le texte des Actes des Apôtres et peut-être décaler un peu notre perception de la “communauté ” avec les “communs”, cette mise en commun de ressources allant des jardins partagés, au logiciels libres, les sciences ouvertes, les lieux d’énergie renouvelable collaboratifs, je souhaite que nous soyons peut-être plus attentifs à toutes ces initiatives orientées vers le bien commun.
  • La paix soit avec vous ! c’est d’abord la communauté que nous recevons, c’est celle de la paix que nous recevons… semaine pascale à Taizé, partage, fraternité, reliance… on se sentait rapidement comme de la même famille, en échangeant quelque chose d’essentiel… et Saint-Merry Hors-les-Murs est au coeur de ce mouvement.
  • La notion de communauté est absolument exigeante et demande des efforts de chacun pour proposer des actes ; mais attention aux dangers du communautarisme, du “chacun sa chapelle”; il nous faut aller à la rencontre du monde incroyant
  • Faire communauté… des communautés meurent aussi, c’est le cas de celle de St Bernard du Montparnasse qui a acté de son ” décès”…. et je pose la question de la transmission, aux jeunes, à des non-croyants.
  • Communauté de Saint-Merry, communauté “d’élection”… mais communauté dispersée aujourd’hui… Qu’est-ce qui ordonne notre communauté ? Bien sûr, la présence du Christ et l’injonction à la mission ; en anglais, ” community ” indique l’appartenance à un espace particulier et avec une caractéristique commune, que nous avons gardée, certes, mais on manque d’un espace… ce qui est une épine dans notre pied…. la communauté numérique risque de nous déshumaniser partiellement sans la richesse de se retrouver.

Alléluia, alléluia, alléluia (bis)

1 Proclamez que le Seigneur est bon,  éternel est son amour !
Que le dise la maison d’Israël, éternel est son amour !

2- Dans l’angoisse j’ai crié vers lui, le Seigneur m’a exaucé.
Le Seigneur est là pour me défendre, j’ai bravé mes ennemis.

3- Le Seigneur est ma force et mon chant, le Seigneur est mon salut.
Je ne mourrai pas, non je vivrai, je dirai l’œuvre de Dieu.

4 Ouvrez-moi les portes de justice, j’entrerai, je rendrai grâce.
C’est ici la porte du Seigneur, tous les justes y entreront

5- Oui, c’est toi mon Dieu, je te rends grâce, Seigneur mon Dieu, je t’exalte.
Proclamez que le Seigneur est bon, éternel est son amour !

C’est le moment de formuler les prières, aux dimensions du monde, que nous avons dans le coeur. Nous vous invitons à orienter vos intentions sur nos enfermements, sur ces portes fermées en nous, dans notre communauté et qui seraient censées nous protéger. Prions pour que, malgré nos portes fermées, l’Esprit de Jésus, en nous, puisse agir !

Jean-Luc L.

Refrain : Alors, au creux de nos refus, alors au fil de nos déroutes,
La braise qui ne s’éteint plus, éclaircira le temps du doute.

La communauté a porté dans sa prière :

  • chacune et chacun pour que l’Esprit nous inspire vraiment la parole quand il s’agit de parler avec des partisans d’extrême droite, que ce soient des voisins, des gens dans la rue… on se sent bien impuissant
  • nous tous, invités à ” aller vers “, avec cette chance d’être hors-les-murs.
  • Léandre, notre compositeur favori, hospitalisé, et Monique son épouse.
  • nos dirigeants, qu’ils trouvent le courage de prendre des décisions courageuses pour le dérèglement climatique ; qu’ils aient beaucoup plus confiance dans la population, pour accepter les choses dans le sens du partage.
  • celui qui va s’engager comme diacre la semaine prochaine.
  • les membres de la communauté de St Bernard du Montparnasse
  • nos impuissances devant ces catastrophes humaines : génocide au Rwanda et massacre du 7 octobre en Israël et de ce qui a suivi en Palestine… puissions nous nous interroger sur comment retrouver une parole forte face à de tels événements, une parole animée par notre foi

« La paix soit avec vous » ce sont les premiers mots que Jésus prononce les deux fois où il vient au milieu d’eux. Loin d’être porteurs d’une simple salutation formelle, ils sont une invitation à faire d’abord la paix en nous puis à dire à notre voisin « la paix soit avec toi », seule condition afin de pouvoir rencontrer le Christ, donc avant de pouvoir le suivre

Alain C.

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