Nous avons dit un à-Dieu bouleversant à Bruno René-Bazin, vendredi 15 mars, dans l’immense nef de Saint-Eustache, noire de monde. Bruno fut un animateur passionné de la vie associative, de l’accueil des migrants à la vie politique locale, depuis son quartier des Halles jusqu’à l’Europe et l’Amérique latine. Il a créé ou fait partie de plus d’une vingtaine d’associations sociales engagées auprès des plus démunis. Bruno a été et restera une figure de proue de notre communauté de Saint-Merry Hors-les-Murs.
Entrée du cercueil
Señor ten piedad de nosotros : Misa criolla (Seigneur prends pitié de nous)
Le temps de l’accueil et rite de la lumière
Immense action de grâces envers Dieu pour la belle vie donnée à Bruno.
Les enfants et petits enfants déposent une lumière sur le cercueil de Bruno.
Introduction à la célébration
Papa, Aitaxi pour tes petits-enfants,
Nous sommes aujourd’hui réunis, pour toi, au cœur du quartier où tu t’es installé avec maman au milieu des années 60, un ancrage très fort, qui aura accompagné 60 ans de vie à faire rimer ton héritage familial et tes choix personnels.
Aurais-tu pu vivre ailleurs qu’au centre de Paris, après avoir parcouru le Monde ? Je ne le crois pas.
Ce centre de Paris, théâtre de tant de changements de notre société : sociaux, politiques et spirituels, autant de combats dans lesquels tu t’es investi, avec un fil rouge : faire une place à l’autre, à l’étranger.
Ce centre de Paris, point de départ idéal pour Bruxelles et d’autres capitales pour défendre ton idéal européen.
Ton centre de Paris où tu accueillais à ta table, si inventive et personnelle, ceux de passage pour un repas, une nuit ou quelques mois, du quartier, d’Amérique latine ou du Canada.
Ton centre de Paris dont tu t’échappais, vers votre maison d’Urt, savourer la vie, des rives de l’Adour à la Bidassoa, mais jamais très longtemps, rappelé volontaire par tes engagements.
Aujourd’hui autour de toi, autour de nous, sont rassemblées toutes les facettes de cette vie complète et intense.
Cette vie était surtout sincère. Tu étais à l’aise avec tous, avec tes convictions, ouvert et curieux des autres et du Monde.
Papa, Aitaxi, tu nous manques déjà.
Raphaël RB
Témoignages
Cher Bruno,
Apprendre que tu nous quittes alors que j’étais à 20 km de votre maison au Pays Basque, que tu aimais tant, où nous avons passé de chaleureux moments ensemble, a bien sûr, renforcé ma peine. Ma douleur reste immense. Alors que tu es là, parmi nous, entouré de ta famille et de tous tes amis, je me dis que tu n’as pas disparu. Tu étais toujours avec nous, tu restes et tu resteras avec nous, pour nous guider, nous instruire grâce à tes connaissances, tes jugements toujours lucides et ton dynamisme. Tu as longtemps réfléchi, aidé, soutenu des activités auprès d’associations en soutien aux populations en difficulté. Catholique de gauche, tu étais resté, bien sûr, attaché à la sociale-démocratie. Ainsi, je ne peux pas penser à toi sans évoquer l’homme d’esprit, de combativité et d’humanisme, toutes qualités que vous partagiez avec Jacques Delors, qui nous a quittés récemment.
Tu connaissais évidemment beaucoup de monde dans le milieu politique, mais tu étais profondément proche de la vie de notre quartier. Tu étais toujours disponible à nos concitoyens qui t’interpellaient, sachant les écouter, les comprendre et accorder du crédit à l’authenticité, au regard et aux paroles de tes interlocuteurs avec l’humanisme et l’élégance dont tu ne te départissais jamais.
Homme d’esprit et de générosité, tu étais aussi militant, participant aux diverses campagnes, en particulier municipales, avec conviction, combativité et foi dans l’avenir. Tu as ainsi participé à celle d’Ariel Weil en 2020, restant un exemple et une référence pour toute la jeune équipe.
Sur le plan social, tu étais très actif à la Clairière, association caritative qui a pour vocation de prévenir l’exclusion définitive des familles les plus fragilisées du centre de Paris ainsi que des migrants. Tu étais aussi membre de l’Association d’Urbanisme de Paris Centre, chargée de réfléchir et de mener des actions pour le bien être des habitants.
Je garde en mémoire les discussions que nous avons eues à propos des drames que vit notre monde, le Moyen Orient, l’Ukraine, les guerres et les famines en Afrique, toutes choses qui te bouleversaient, comme nous tous.
Nous pourrions ajouter tant de choses te concernant, mais je veux laisser du temps au recueillement.
Je terminerais en reprenant tes propres mots, prononcés pour notre ami Alain Le Garrec : « le souvenir que nous gardons de toi nous permet de te sentir parmi nous, pour défendre les valeurs qui te donnaient la joie de vivre ».
Roland
Bruno et Saint-Merry, une communauté parisienne ouverte sur son environnement
Pendant plus de deux ans, j’ai participé avec Bruno à l’équipe d’animation de Saint-Merry.
Nous étions plusieurs à avoir été sollicités, des personnalités et des attentes différentes pour des responsabilités à partager. Tout de suite Bruno a fait émerger des lignes de force susceptibles de réunir les uns et les autres.
Dans ces responsabilités partagées à Saint-Merry, Bruno était un appui fédérateur, toujours avec bienveillance, pour mettre en œuvre les décisions prises.
Cette responsabilité collective, sans trop de tensions, a pacifié la communauté.
Par exemple, elle a permis de mettre en œuvre un projet magnifique : une semaine « Street art », exceptionnelle, dans et hors l’église Saint-Merry: une ouverture sur la rue, pour tous…. Grâce à une ambiance collective qui donne l’élan, on peut créer même des projets fous !
Comme dans d’autres domaines, Bruno a été moteur également dans l’action d’appui aux migrants en participant activement au réseau chrétien immigrés, y compris en intervenant dans les réunions diocésaines.
Bruno était un artisan de paix.
Marie-Thérèse J.
Aujourd’hui, je voulais partager avec vous ce droit de réponse que Papa avait écrit dans La Croix à la suite d’une série de reportages sur LA PAROLE au moment de la crise des Gilets Jaunes.
« Comment tu me parles ? » La parole des migrants pleine d’espérance
Une parole qui compte beaucoup, vous l’avez peut-être un peu oubliée dans ces reportages, c’est celle des migrants. Dire leurs périples sans télé, sans images, à travers les pays du Proche-Orient, le désert libyen ou la Méditerranée, est le seul moyen qu’ils ont de nous faire partager « leur » histoire. C’est aussi la clé bien souvent de la reconnaissance de leur dignité et de l’obtention de papiers en France.
À condition de savoir les écouter, les comprendre, leur accorder le crédit de l’authenticité, le regard de leur interlocuteur change, qu’il s’agisse des administrations et de ceux qui les croisent. Finalement, nous sommes tous et toutes concernés par leur parole. Elle est salutaire car elle nous informe viscéralement des désordres et des horreurs qui détruisent notre planète, des guerres, de la faim, de la corruption… mais aussi de leurs immenses capacités d’espérance. Puissent-ils avoir au moins une place sur les ronds-points de nos consciences !
Matthieu (et Bruno)
Cher Bruno (BRB pour les intimes),
Entre nous, Bruno, c’est une vieille histoire : c’est surtout une belle histoire !
Depuis Marseille, où nous habitions à l’époque des années 80, Gilles et moi étions déjà en relation avec toi, président d’Inter Service Migrants.
Sachant notre prochain retour à Paris, tu nous avais branchés sur Saint-Merry, une communauté vivante de chrétiens ouverts sur le monde. Où, ailleurs, aurions-nous pu aller ? À l’époque, Saint-Merry était très engagé pour l’Amérique latine et tu t’y investissais passionnément.
Nous nous sommes aussi retrouvés à la Vie Nouvelle, ainsi que Jacques et Marie-José Ledru. Avec Gilles, tu étais un pilier du secteur Europe.
La Vie Nouvelle… Ses fraternités, ses sessions, ses voyages d’étude : occasion de nous retrouver au Pays Basque à Urt (je me souviens d’une charmante maison au jardin envahi de bambous), et aussi en Bretagne, à Carnac, où nous avons eu la joie de t’accueillir.
Mais, qui n’a pas dîné chez les René-Bazin n’a rien vu ! Bruno, grand chef, tu puisais tes menus dans tes innombrables livres de recettes et tu « entrais en cuisine » plusieurs heures avant le repas. Inoubliables saveurs sous les jacassements des perroquets !
Je n’oublierai pas : durant la maladie de Gilles, le dimanche en fin de célébration, à Saint-Merry dans les murs, tu venais vers moi avec ton agenda électronique (quel homme moderne !) pour convenir du prochain rendez-vous avec ton ami malade qui t’attendait dans son Ehpad, chez Monsieur Vincent.
La fidélité d’une amitié.
Et puis, ces derniers temps, à l’atelier Familles ou à Notre-Dame d’Espérance, quelle joie de te revoir : déjà bien marqué par la maladie, mais fidèle au poste (« Sans Anne, je serais parti depuis longtemps ! » disais-tu souvent).
Fidèle au poste, inlassablement curieux de l’autre, tu demandais des nouvelles de toute la famille.
La force et la fidélité d’une amitié… Un homme d’altérité et d’engagement.
Merci Bruno pour tout ce que tu nous as donné. Tu resteras toujours vivant dans nos cœurs.
Odile G.
Le temps de la Parole
Quitter sa famille : l’appel d’Abraham (Gen 12, 1)
YHWH dit à Abram :
va pour toi,
sors de ton pays,
de tes origines,
de la maison de ton Père,
vers le pays que je te ferai voir.
(Traduction Bayard)
Être acteur de sa vie : Deutéronome (30, 11-14, 19)
Ce commandement que je te prescris en ce jour n’est pas à ce point stupéfiant, ni hors de portée pour toi.
Il ne flotte pas dans les cieux. Il ne se trouve pas non plus au-delà des mers.
Elle est proche, au contraire, cette Parole, toute proche de toi, sur tes lèvres, dans ton coeur, afin que tu la mettes en pratique.
Je te donne le choix entre vie ou mort ! Choisis donc la vie, afin que tu vives, toi-même et ta postérité, en aimant YHWH ton Dieu, écoutant sa voix, et t’attachant à lui ! (Traduction Bayard)
Vivre l’accueil : Élisée au 2ème livre des Rois (4, 8-10)
Un jour, le prophète Élisée passait à Sunam ; une femme riche de ce pays insista pour qu’il vienne manger chez elle. Depuis, chaque fois qu’il passait par là, il allait manger chez elle. Elle dit à son mari : « Écoute, je sais que celui qui s’arrête toujours chez nous est un saint homme de Dieu.
Faisons-lui une petite chambre sur la terrasse ; nous y mettrons un lit, une table, un siège et une lampe, et quand il viendra chez nous, il pourra s’y retirer. » (TOB)
♫ Psaume 26 : Le Seigneur est ma lumière et mon salut
Le Seigneur est ma lumière et mon salut
De qui aurais-je crainte?
Le Seigneur est le rempart de ma vie
Devant qui tremblerais-je ?
J’ai demandé une chose au Seigneur
La seule que je cherche
Habiter la maison du Seigneur
Tous les jours de ma vie.
Habiter ta maison, Seigneur
Pour t’admirer en ta bonté
Et m’attacher à ton église, Seigneur
M’attacher à ton église, Seigneur.
J’en suis sûr, je vénère les bontés du Seigneur
Sur la terre des vivants
Espère, sois fort et prends courage
Espère, espère le Seigneur.
♫ Acclamation de l’Évangile
Ta Parole, Seigneur, est lumière, Gloire et Louange à Toi,
Ta Parole, Seigneur, nous libère, Gloire et Louange à Toi,
Ta Parole aujourd’hui nous fait vivre, Gloire et Louange à Toi,
Évangile de Jésus-Christ Mt (3, 13-17) : l’engagement d’une vie au service de l’humanité
Jésus arrive de la Galilée au Jourdain, vers Jean, pour être baptisé par lui. Celui-ci l’en détournait, en disant : « C’est moi qui ai besoin d’être baptisé par toi, et toi, tu viens à moi ! » Mais Jésus lui répondit : « Laisse faire pour l’instant ; car c’est ainsi qu’il nous convient d’accomplir toute justice. » Alors il le laisse faire.
Ayant été baptisé, Jésus, aussitôt, remonta de l’eau ; et voici que les cieux s’ouvrirent : il vit l’Esprit de Dieu descendre comme une colombe et venir sur lui. Et voici qu’une voix venue des cieux disait : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, qui a toute ma faveur ».
Résonances
Jean voulait l’en empêcher et disait : « C’est moi qui ai besoin d’être baptisé par toi, et c’est toi qui viens à moi ! » (Mt 3,14) Mais Jésus insiste, il ne se voit pas à la place où Jean le met, il n’est pas « arrivé », il est sur le départ.
Il y eut une voix venant des cieux : « C’est lui, mon fils, l’aimé, en qui je suis heureux » (Mat 3/17)
Le bonheur de Dieu n’est pas d’avoir un Fils, c’est que ce fils parte, qu’il aille vers les autres, crée le lien entre Lui et les autres, fasse en sorte qu’il n’ait, parmi les hommes et les femmes, que des fils et des filles, qui, à leur tour, partent…
Cela a donné pour Bruno :
- L’amour de la vie, qui se traduit dans la balade, la cuisine, l’accueil (on ne relie pas assez le souci d’une cuisine élaborée, même simplement, au souci d’un vivre ensemble vital et vrai)
- Une hospitalité et une fraternité sans faille
- Son indépendance, qui ne craint pas de s’exposer : « Tout le monde sait qui je suis » et lui permet d’assumer ses convictions sans les imposer.
- Une vision universelle et souple de l’Église : « Ta maison, Seigneur » dans laquelle tous n’ont pas à être baptisés (le baptême est le fruit de l’Église, il n’en est pas la douane d’entrée)
- Réseau Chrétiens Immigrés (RCI). Un engagement dans le monde qui retourne la vision de l’immigré : il n’est pas l’autre différent qui vient prendre ma place, il est l’autre semblable qui me manque, d’Amérique latine ou d’Afrique.
Persévérez ! Partez, parlez, revenez, témoignez, croisements, affrontements, connaissance et reconnaissance, il y a toujours quelque part où aller trouver des frères et sœurs.
Le silence de Dieu
De Dieu, en vérité, nous ne pouvons rien dire qui convienne à tout le monde, qui convienne à tous, avec nos vies si différentes, voire antagonistes.
Ce qui est extraordinaire, c’est qu’il soit possible à chacun de chercher et d’écouter en lui-même la voix et donc une présence, c’est-à-dire de trouver un bonheur qui lui est propre, d’éprouver la paix qui vient de ce bonheur, qui rayonne dans toute sa vie.
C’est ce bonheur personnel du croyant qui trouve la paix en lui-même que Bruno savait nous transmettre,
transmettre à ses proches, transmettre à ceux avec qui il s’engageait.
« Pourquoi m’as-tu abandonné ? » Je crois que je n’ai plus la foi.
Mais quand la vie se ralentit, la confrontation avec cette paix intérieure s’affaiblit aussi, et nous nous retrouvons face à face avec un Dieu muet, absent, face à un vide !
À ce que nous prenons pour un vide.
Quand nous avons célébré, à l’hôpital, le sacrement des malades, Bruno a commencé par dire avec tristesse : « je crois que je n’ai plus la foi », puis après l’onction, il le dit à nouveau mais avec légèreté et dans la paix.
Au baptême, Dieu dit à Jésus : « C’est toi, mon fils, l’aimé, en qui je suis heureux » et quelques années plus tard Jésus lui répond : « pourquoi m’as-tu abandonné ? »
La foi semble avoir perdu tout contenu, même pour Jésus, qui ne ressent pas encore qu’il est à nouveau fusionnel avec son Père.
À ce moment-là, la foi remplit tout, elle est tout, mais elle n’est plus traduisible en paroles.
C’est devenu un mystère unique qui nous colle au monde, un mystère qui émerge dans la splendeur d’une vie donnée, un bonheur et une grâce.
Bruno nous a donné sa grâce.
Jacques Mérienne
Méditation musicale
Solo pour la flûte traversière Partita in La m – BWV 1013 : Allemande
Choisir la vie, dans les pas du Christ
Bonjour à toutes et à tous,
Il existait un plan A, le plus évident : une homélie de Jacques Mérienne. Mais Jacques se faisait opérer de la hanche en début de semaine. Et il a fallu envisager un plan B : une cérémonie sans lui. Quand ce matin à 11h00, Jacques a dit à Anne qu’il serait présent avec nous pour cet À Dieu à Bruno, il a été décidé d’un plan A et B.
Je suis ici le porte-parole d’Anne qui désire pointer deux ou trois choses.
Tout d’abord vos témoignages, leur abondance et leur variété ; montrant l’implication de Bruno dans des domaines si divers. Comment les dire tous ? Ils sont un grand soutien pour Anne – et pour la famille. Merci !
Et puis les lectures choisies. Se laisser aimer. Laisser faire Jésus, qui se fait plus petit que nous et nous fait comprendre combien nous sommes aimés. Anne dit : « Oui, on a beaucoup été éduqué dans l’intention, on pourrait même dire l’injonction : “ Aime l’autre ! ”, mais ce que Jésus dit là, c’est : “ Laisse-toi aimer ! ” Et on a encore du chemin à faire… »
Et enfin, la force d’une communauté comme celle de Saint-Merry, permettant l’exercice d’acrobates en duo d’un prêtre avec un laïc, et même une laïque, femme, qui lise l’Évangile. Oui, l’Église autorise les femmes à lire et à commenter l’Évangile pendant les cérémonies des funérailles. Mais, hors funérailles, c’est rare ! Et cette liberté rend hommage à la grande audace de Bruno.
Ce sont tous ces exercices de prises de conscience, exigeantes, qui nous éduquent et nous encouragent. Ce qui a habité Bruno, et l’héritage qu’il nous laisse en partage, c’est de pouvoir œuvrer ensemble, de s’approprier nos intuitions, et de les mettre en pratique – comme dit le livre du Deutéronome. « Une communauté comme celle-là, a une capacité à changer le monde ! », dit Anne, et elle le répète trois fois. C’est important.
Nous tous ici, chacun, chacune, nous avons cet élan, en nous ; à la suite de Bruno, à nous de nous laisser aimer et de choisir la vie, dans les pas du Christ : la Vie Vivante !
Agnès Charlemagne
Improvisation aux grandes orgues de Saint-Eustache
Par Thomas Ospital, co-titulaire des grandes orgues
Prière universelle
♫ Pour les hommes et pour les femmes, pour les enfants de la terre
Ton Église, qui t’acclame, vient te confier sa prière.
« Merci à Dieu d’avoir inspiré et guidé son actif serviteur, Bruno », nous a écrit l’un d’entre vous.
Que Dieu nous inspire pour devenir davantage artisans d’humanité, avec une belle ouverture d’esprit, un goût de l’autre quand il est différent, un sens de l’hospitalité.
Que nos prières offrent espoir, conseil et encouragement. R/
À l’hôpital Bruno disait : « le verre d’eau qu’on me donne quand j’ai soif, je sais que pour les habitants de Gaza c’est un trésor inaccessible ». Il en était très malheureux.
Que Dieu nous inspire pour agir, afin que les peuples en guerre parviennent à une paix juste, et vivent en sécurité. R/
Bruno nous encourageait quand nous étions désespérés de l’abandon des migrants,
Que Dieu nous inspire de persévérer auprès des hommes, femmes et enfants qui sont partis ce chez eux, dans notre devoir d’accueil et d’écoute, mais aussi de respect et de reconnaissance de la dignité de tous ceux qui sont nés quelque part. R/
Par ses engagements concrets, Bruno a inspiré de nombreux jeunes dans leur parcours : depuis notre rencontre à la Vie Nouvelle, alors que j’avais 23 ans, par ses conseils bienveillants et ses questionnements exigeants, il a toujours été un témoin fidèle et un guide précieux, éclairant mes choix.
Que Dieu nous inspire pour que nous sachions donner l’envie de l’engagement constructif, du débat positif et pour prendre soin de la terre. R/
Mianne, que Dieu t’inspire pour que tu continues ton chemin, dans la confiance, pour ce nouveau chapitre, en conservant ton goût de la vie et du partage avec les autres, entourée par ta famille et tes proches. R/
Temps de l’Eucharistie
♫ Sanctus
Saint le Seigneur, Dieu des vivants, Hosanna au plus haut des cieux (bis)
Le ciel et la terre sont remplis de ta gloire, Hosanna au plus haut des cieux
Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur, Hosanna au plus haut des cieux
Saint le Seigneur, Dieu des vivants, Hosanna au plus haut des cieux (bis)
♫ Anamnèse
Christ est venu, Christ est né
Christ a souffert, Christ est mort
Christ est ressuscité, Christ est vivant
Christ reviendra, Christ est là (bis)
♫ Agnus
R / La paix elle aura ton visage, la paix elle aura tous les âges
La paix sera toi, sera moi, sera nous
et la paix sera chacun de nous
Agneau de Dieu qui enlèves le péché du monde, prends pitié de nous
Agneau de Dieu qui enlèves le péché du monde, donne-nous la paix.
Notre Père
Un Notre Père dit ” de l’autre côté” ou quand Dieu nous prie…
Mon fils / ma fille, qui es sur la terre,
Fais que ta vie soit le meilleur reflet de mon nom.
Engage-toi pour mon règne, à chaque pas que tu fais,
dans chaque décision que tu prends,
dans chaque attitude et chaque geste.
Construis-le pour moi et avec moi.
C’est là ma volonté sur la terre comme au ciel.
Reçois le pain de chaque jour,
conscient.e que c’est un privilège et un miracle.
Je te pardonne tes erreurs,, tes chutes, tes abandons,
mais fais de même face à la fragilité de tes frères.
Lutte pour plus de justice et de paix, et je serai à tes côtés.
N’aie pas peur : le mal n’aura pas le dernier mot.
Amen.
(Traduit d’après José Maria Rodriguez Olaizola s.j., Revue Jesuitas, Primavera 2017, p. 9)
Communion :
♫ Chant : Trouver dans ma vie ta présence (P&M JC. Gianadda)
Trouver dans ma vie ta présence
Tenir une lampe allumée
Choisir d’habiter la confiance
Aimer et se savoir aimé.
Croiser ton regard dans le doute
Brûler à l’écho de ta voix
Rester pour le pain de la route
Savoir reconnaître ton pas.
Brûler quand le feu devient cendres
Partir vers celui qui attend
Choisir de donner sans reprendre
Fêter le retour d’un enfant.
Ouvrir quand tu frappes à ma porte
Briser les verrous de la peur
Savoir tout ce que tu m’apportes
Rester et devenir veilleur.
Témoignages
Aitaxi, (grand-père en basque)
Lorsque nous nous sommes retrouvés entre cousins et cousines pour nous remémorer tout ce que tu nous as transmis, une phrase d’un chimiste bien célèbre nous est venue : « rien ne se perd, tout se transforme »
Cette maxime résonnait naturellement dans ta cuisine, quand tu nous expliquais par exemple que « la meilleure partie du poisson, c’est la joue ». Quoi que…, l’eau de cuisson n’en est pas moins importante…
La cuisine avait une telle importance dans ta vie, comment ne pas l’évoquer.
Tout d’abord, avec La crème d’anchois – ça vous parle ? Devant vos regards ébahis, je me dois de préciser mon propos. La crème d’anchois, c’est simple, c’est comme un tube de dentifrice, mais avec un goût d’anchois, incontournable des petits déjeuners, rue de Turbigo. Tu en gardes une quantité à faire rougir les meilleurs fournisseurs de Rungis ! (si vous souhaitez y être initiés, la planque se trouve dans l’arrière cuisine)
Ensuite, ta chronique quotidienne, “Les salades du confinement”, qui ont fait le tour de la France et la Navarre. Un exemple vaut mieux que mille mots – sortez vos stylos – : “Mardi 6 Janvier 2021 : Chicorée frisée, demi-tomates cerise, anchois au vinaigre de vin, croûtons garnis de restes (beurre blanc, gelée de piment d’Espelette, raisins macérés au Jurançon) et quelques pétales de fleurs de bégonia”, s’il vous plaît ! Rien ne se perd, tout se transforme, même les fleurs du balcon y sont passées.
Des plantes en cuisine, parlons-en !
Hugues pourrait en témoigner, quand deux heures après être tombé dans les orties, Aitaxi lui en servait en soupe pour le dîner. Rien ne se perd, tout se transforme !
Tu avais toujours cette détermination à exprimer ta créativité et à ravir les autres, surtout lorsque tu persistais à cuisiner pour tous, malgré tes nombreuses restrictions médicales et nutritionnelles. Bien sûr, nous parvenions toujours à faire quelques exceptions de temps en temps, notamment avec la chartreuse sous toutes ses formes (liquide bien sûr, mais aussi glacée figurez vous !).
Mais, si l’on y réfléchit bien, il n’y avait pas vraiment beaucoup d’options : pas de sel, pas de sucre, pas de chocolat, pas de potassium, pas trop de gras, et ainsi de suite.
Cela aurait pu aboutir à quelque chose d’absolument insipide, mais probablement, grâce à ta carrière de chimiste, tu trouvais toujours un petit ajout pour rendre le tout savoureux, ton petit grain de sel… sans sel.
En tout cas une chose est sûre, la table de la rue Turbigo était toujours ouverte…
Faire plaisir aux autres, mais surtout s’intéresser aux autres. Tes nombreuses aventures tout autour du monde nous ont émerveillés, quand on était petits et encore aujourd’hui. Nous nous souviendrons à jamais de tes péripéties tout autour du monde, d’Haïti au Chili en passant par les geôles de Batista sans oublier un combat Don Quichottesque contre… une clef à molette au Maroc.
Grâce à ces voyages, tu avais partout quelqu’un à nous faire saluer quand nous partions à notre tour à l’aventure.
Cette ouverture sur le monde était essentielle pour toi, tu nous l’as toujours partagé en particulier en nous abonnant à une multitude de revues intellectuelles comme Astrapi, Okapi puis, dans un registre plus léger, à Courrier International. Chaque fois que nous passions rue de Turbigo, nous savions qu’au moins un article de La Croix nous attendait, minutieusement découpé et mis de côté avec notre nom dessus. Là encore, rien ne se perd, tout se transforme !
Rien ne se perd, tout se transforme. Cela est évidemment valable en bricolage et autre récupération made in Emmaüs. Je vous plante le décor : vous arrivez dans la maison d’Urt, poussez la porte d’entrée à l’aide d’une poignée récupérée à la brocante du coin. Vous voulez vous laver les mains ? Pas de soucis, le sopalin ou encore le porte serviette sont accrochés au mur par un solide système en bambou. La porte est lourde ? Aucun problème, un contrepoids à base de bambou fera le travail à votre place.
On pourrait continuer sans fin, car il faudrait aussi parler de ta passion pour la musique, le jardinage, la natation – à Paris et à La Bastide Clairence avec Bernadette, maître nageuse en chef – ta passion pour les marchés, le marché aux oiseaux, le marché d’Aligre à Paris et le marché aux poissons de Bayonne.
Ta collection de journaux qui datent d’avant même notre naissance, des objets publicitaires et autres chaussons d’hôtels, ta montre caisse d’épargne que tu auras gardé jusqu’à la fin, et ton entêtement sur comment faire une sauvegarde de la sauvegarde de ton ordinateur, oui parce que « comment je fais si je perds tous mes mails ? ».
Aitaxi, en quelques mots nous aimerions te dire merci. Merci d’avoir été un grand-père attentif et délicat, merci pour ta bonne humeur et ton humour, merci pour tout ce que tu nous as transmis. Nous sommes extrêmement fiers d’être tes petits-enfants, nous garderons toujours les moments passés avec toi, en mémoire et en films – avec en bonus une collection considérable de tous les pieds de chacun sur plusieurs générations !
Tes derniers mots pour nous ont été d’être heureux, et bien, fais-nous confiance, nous ferons tout pour l’être. Et nous admirerons toute notre vie ton courage et ton dévouement pour nous, tes 47 neveux et nièces et tous ceux qui se joignent, de près ou de loin, à cet hommage.
Aujourd’hui, nous honorons non seulement ta mémoire, mais aussi l’héritage que tu nous laisses. C’est un héritage de force, de courage et de compassion, un héritage qui continuera de nous guider.
Nous savons que tu veilles sur nous et nous tâcherons de suivre ton exemple d’humanisme et d’engagement.
Enfin, pour finir ce témoignage, et comme rien ne se perd, tout se transmet, nous proposons que chacun fasse la croix de Mamie sur le front de son voisin, comme il aurait tant aimé vous la faire à tous.
Quitterie, Théodore, Hugues, Élie, Philippine (petits-enfants)
Temps du dernier adieu
♫ Chant : Je vous salue Marie – Prière de l’Angélus
Musique : Fr. JB de la Sainte Famille
Je vous salue, Marie, comblée de grâces, le Seigneur est avec vous,
Vous êtes bénie entre toutes les femmes, et Jésus, votre enfant, est béni.
Sainte Marie, mère de Dieu, priez pour nous, pauvres pécheurs
Maintenant et à l’heure de notre mort,
Amen Amen, Alléluia.
♫ Chant basque : Hegoak
Hegoak ebaki banizkio
Neuria izango zen
Ez zuen alde egingo (bis)
Bainan horrela
Ez zen gehiago txoria izango (bis)
Eta nik, xoria nuen maite
Eta nik eta nik, xoria nuen maite
Lala lala lala lala, lala
Si je lui avais coupé les ailes
Elle aurait été mienne
Elle ne serait pas partie (bis)
Mais ainsi,
Elle n’aurait plus été un oiseau (bis)
Et moi, c’est l’oiseau que j’aimai
Et moi, et moi, c’est l’oiseau que j’aimai
Lala lala lala lala, lala
Artisan d’humanité, Bruno René-Bazin fut un animateur passionné de la vie associative, de l’accueil des migrants à la vie politique locale, depuis son quartier des Halles jusqu’à l’Europe et l’Amérique latine.
Merci de nous inspirer, Bruno, et de continuer de marcher sur la route avec nous.
Sortie
Le cercueil de Bruno est sorti sous les applaudissements d’une foule debout, au son de la très belle chanson engagée de Michel Fugain : ♫ Le chiffon rouge ; puis ce furent les grandes orgues !
R / Accroche à ton coeur un morceau de chiffon rouge
Une fleur couleur de sang
Si tu veux vraiment que ça change et que ça bouge
Lève-toi, car il est temps.
Allons droit devant vers la lumière
En levant le poing et en serrant les dents
Nous réveillerons la terre entière
Et demain, nos matins chanteront.
Compagnon de colère, compagnon de combat
Toi que l’on faisait taire, toi qui ne comptais pas
Tu vas pouvoir enfin le porter
Le chiffon rouge de la liberté
Car le monde sera ce que tu le feras
Plein d’amour de justice et de joie. R/
Tu crevais de faim dans ta misère
Tu vendais tes bras pour un morceau de pain
Mais ne crains plus rien, le jour se lève
Il fera bon vivre demain.
Compagnon de colère, compagnon de combat
Toi que l’on faisait taire, toi qui ne comptais pas
Tu vas pouvoir enfin le porter
Le chiffon rouge de la liberté
Car le monde sera ce que tu le feras
Plein d’amour de justice et de joie. R/
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