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La Résurrection. Une présence qui sauve

Christ  est vraiment ressuscité !

« Pâques signifie que la mort est vaincue, ni par la force, ni par de savants calculs mais par une présence. La force aimante de celui que Jésus appelle Père ».
L’édito de Guy Aurenche

Avec des marcheurs 

Ils empruntent péniblement la route pierreuse qui mène de Jérusalem au village d’Emmaüs. (Évangile de Luc, chap. 24-13). Deux heures de marche ne suffiront pas à apaiser leur tristesse. Ils pensaient avoir trouvé en Jésus la Lumière de leur vie. Il vient d’être exécuté. Les dires de quelques femmes selon lesquelles son corps ne serait plus dans le tombeau, ne les consolent pas. Un quidam s’approche. Les sentant « épuisés », il les  fait parler, avant de partager le pain du dîner avec eux. Il disparaît. Ils en sont certains : c’était Jésus, bien présent à leurs côtés. Cette présence a soudainement changé leur vie, mis leur cœur en feu ! Oubliant  fatigue et désespoir, ils repartent en courant pour rejoindre leurs amis. Leur espérance a pris un visage, celui de Jésus qui leur avait partagé la Bonne nouvelle de l’amour.

Diego Velázquez, Cène à Emmaüs, huile sur toile, 1622-23, Metropolitan Museum, New York.

La petite fille espérance

Difficile d’exprimer ce qu’est notre espérance. Il n’y a ni formule magique ni programme irrésistible. Pour Albert Camus, elle se trouve dans la « révolte profondément positive puisqu’elle révèle ce qui en l’homme est toujours à défendre » : l’amour, la justice, la beauté, la solidarité. Le poète Charles Péguy prête à Dieu des propos surprenants : « L’espérance, voilà ce qui m’étonne… moi-même… Il faut que ma grâce (ma présence) soit en effet d’une force incroyable », pour qu’ils ( les humains) espèrent, encore !

Pour d’autres personnes à travers le monde, l’espérance se niche dans le combat pour davantage de justice. Elle motive les foules de Birmanie, les femmes africaines luttant pour la survie de leur famille, les 10 millions d’êtres marginalisés en France qui ne se résignent pas, les opposants aux dictatures, les croyants persécutés qui continuent de croire malgré tout.

Anonyme allemand, Scènes de la Passion et de la Résurrection, 1495 – 1500 env., huile sur bois (163.8 x 55.5 cm), Museo Nacional Thyssen-Bornemisza, Madrid

La résurrection de Jésus n’est pas de la magie

La fête de Pâques ne peut se résumer aux cloches, au chocolat, ni aux œufs, même si ces derniers symbolisent l’espoir d’une nouvelle naissance. La résurrection de Jésus n’a rien à voir avec un tour de passe-passe permettant à une personne mise au tombeau, de sortir du chapeau du magicien. Rien à voir avec un événement qu’une caméra aurait pu enregistrer. La résurrection est beaucoup plus que tout cela : l’expérience totale, physique, psychique, spirituelle, personnelle et commune, de la présence de Jésus, bien vivant, au point de changer radicalement la vie. 

Une présence qui envoie

Les premiers disciples peureux, traumatisés et silencieux redeviennent heureux, pleins d’espérance, les autorités ne parviennent pas à les faire taire. Ils prennent  tous les risques y compris celui de la mort. Depuis 2000 ans, cette présence de Jésus, vécue dans la foi, dans la confiance, dans une dynamique d’amour change tout. Elle donne pleinement sens à l’existence.

Si, selon les récits évangéliques, le Christ ressuscité est insaisissable, il n’en est pas moins pleinement « actif », non comme un horizon idéologique ou un imaginaire consolateur mais un appel à transformer le monde. Cette présence est tellement réelle qu’elle se traduit à travers : action et prière, accompagnement personnel et transformation sociale, création artistique ou proposition pédagogique, priorité absolue à la personne et respect de tous les êtres vivants, indifférence aux honneurs et prise de responsabilité… etc.

Une présence qui sauve

Non pas d’abord du péché mais de la solitude mortifère. Les mots, « sauvé, salut », renvoient trop souvent à une espèce de comptabilité entre Dieu et les hommes. Leurs mérites leur permettraient d’entrer dans la vraie vie, tandis que leurs fautes les condamneraient au bannissement éternel. Pâques, la résurrection de Jésus nous disent toute autre chose. Les prisonniers que je visitais dans les geôles des tortionnaires me disaient, après une visite, non pas que leurs problèmes étaient réglés, mais qu’ils étaient « sauvés », et  ajoutaient-ils « car nous ne sommes plus seuls ! ». Une présence peut sauver. Pâques signifie que la mort est vaincue, ni par la force, ni par de savants calculs mais par une présence. La force aimante de celui que Jésus appelle Père. Au cœur de nos morts et de nos violences, Pâques nous dit : : « Vous n’êtes plus seuls ! Jésus a traversé la mort, le Père  est avec vous ». Le désespoir de nos deux marcheurs est vaincu par sa Présence. Reprenons la route !


Image à la Une : Maître du Retable Ehningen, Triptyque de la Résurrection, env. 1482, Staatsgalerie, Stuttgart.

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Guy Aurenche

Avocat honoraire, membre de la Commission Droits de l’homme de Pax Christi, ancien président de l’ACAT et du CCFD-Terre solidaire. À lire de Guy Aurenche : « Droits humains, n’oublions pas notre idéal commun ! », éd. Temps présent, 2018.

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