8 mars 1932 – 12 juillet 2021

Minou veillait sur Saint-Merry, plus que chacun d’entre nous : la fenêtre de son salon surplombait le chevet de notre église.
Elle était à la fois de la paroisse en allant quotidiennement à la messe de 12h15 et du Centre pastoral en participant à la messe de 11h15 le dimanche, qui rassemblait du monde venu de partout. On trouvait Minou à l’accueil des concerts du WE, mais aussi à la table d’Accueil des visiteurs, dans l’accueil des gens de la rue et dans de multiples groupes, y compris dans l’art. Et on lui rendait bien. Elle était au cœur de la ruche qu’a été Saint-Merry et elle lui donnait un miel extraordinaire.

Minou en manif


Aujourd’hui, cet À-Dieu est plein de symboles : elle qui avait participé aux premières réunions du groupe Beaubourg sur l’art s’en va lors de l’ultime exposition lumineuse et spirituelle de Saint-Merry : « Dans l’abîme d’en haut ». Et l’église est pleine de la lumière d’été.


En 2013, elle me confiait : « Je suis fière de ne m’être brouillée avec personne ; je suis sûre de n’en vouloir à personne ».
Mais comment est-ce possible ?
D’abord parce qu’elle était une femme libre. Ensuite parce qu’elle était bonne et généreuse de son argent, de son temps. Saint-Merry l’aidait à vivre, car elle vivait  au milieu de tous et auprès de grandes figures : Gérard au cœur très large qui célèbre aujourd’hui. Joseph, le prêtre charismatique, la liberté incarnée. De lui, elle disait « La foi des autres vous donne la foi ». Jean-Claude, un ami très proche, conservateur de la bibliothèque nationale et gardien de l’histoire de Saint-Merry, dont la foi et le dévouement total étaient des témoignages de sainteté. De lui elle disait « ses phrases m’irradient », de lui aussi elle tenait sa tranquillité devant la mort : « je n’ai pas peur de la mort. On se donne de la confiance avant la mort ». 

Comment aurait-elle vécu le drame récent de la suppression  autoritaire du centre pastoral par l’archevêque ? Elle se serait certainement révoltée, car chez elle la foi n’était pas dissociable d’un engagement contre toutes les situations d’injustice. « Droits devant » était sa troisième famille, après la sienne, après Saint-Merry et avant ses relations en Inde où elle allait plusieurs mois chaque année.


Elle disait : « J’ai vécu une vie agréable avec beaucoup de drames ». Et c’est le drame des autres dont se nourrissait sa foi. Quand elle marchait dans les manifs, pour les sans-papiers, pour les Palestiniens, c’était sa foi dans la dignité humaine, tout simplement sa foi qui la faisait marcher. Mais sans jamais le moindre prosélytisme. Il lui fallait être disponible à tous et tout le temps. Je lui demandais si c’était bien raisonnable. « Cela aide les autres à avancer » m’a-t-elle répondu. 
Elle me savait professeur des universités, elle m’a beaucoup appris. Elle était mon aînée dans la foi.

Michel Micheau

Laisser un commentaire (il apparaitra ici après modération)

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.